Si trois principaux gaz sont connus : CH4 (méthane), C02 et N20 (protoxyde d’azote), il y a un véritable enjeu sur l’azote. « Quand SysFarm réalise des bilans carbones chez les agriculteurs, les émissions dues à l’azote en système conventionnel représentent 80 % du bilan », précise Antoine Gilbert, président SysFarm. La start-up accompagne pendant cinq ans, les financeurs et les agriculteurs qui s’engagent à mettre en place des leviers agroécologiques.
Avec l’outil CarbonFarm, 600 bilans GES ont été réalisés et 75.000 hectares sont en transition. 375.000 tonnes de CO2 potentielles sont évitées ou stockées par les agriculteurs partenaires de SysFarm.
Pour réussir sa transition, l’accompagnement est nécessaire
Avant de réduire le passage d’un outil, il faut penser à toute la structuration du sol en amont pour permettre aux plantes de s’exprimer afin d’obtenir un maximum de biomasse. Démarrer une transition n’implique pas de réduire l’azote immédiatement.
« Pour bien commencer, il faut produire de la biomasse, relancer les dynamiques biologiques du sol et apporter du carbone qui va s’humifier », explique Lucas Didier, consultant agriculture régénérative chez Biosphères.
Après avoir réalisé un diagnostic, il faut établir un plan stratégique d’actions. Actions qui différeront selon le type de production, les pratiques, les cultures et surtout l’état d’esprit et les objectifs du producteur.
« Il y a des freins et des leviers techniques mais la transition agroécologique est surtout une transition humaine. Il faut changer de vision », insiste-t-il. Biosphères a pour mission de simplifier et de sécuriser la transition vers une agriculture régénératrice.
« Il faut aller chercher la couverture maximale des sols tout au long de l’année avec une utilisation systémique des couverts végétaux. Le bilan humique doit être stable », poursuit-il. Le carbone, source d’énergie, permet de structurer le sol, d’améliorer la pousse de végétaux, une meilleure infiltration de l’eau, de stopper l’érosion et de réduire les pollutions diffuses. « Ainsi, nous augmentons la capacité du système à être fertile d’année en année et donc d’avoir une agriculture productrice et régénérative », indique-t-il.
En arboriculture, Biosphères travaille avec Andros sur l’implantation de couverts en interrang sur abricotiers, en zones très sèches et très dégradées. « Notre intervention nous a permis de remettre en place un bilan humique efficace en apportant beaucoup de matières organiques, notamment par les couverts », explique Lucas Didier.
Non seulement, c’est intéressant sur le plan agronomique et environnemental mais aussi économiquement, car le producteur peut se passer d’au moins deux passages d’herbicides sur la saison.
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Restaurer les écosystèmes
La restauration des écosystèmes débute par le sol. « En vigne par exemple, ont été plantés des couverts en interrang avec des plantes herbacées à fleurs. Dans les parcelles équipées, il y a six fois moins de cicadelles que sur celles non équipées. Ces couverts se sèment une fois et s’entretiennent », précise Sébastien Roumegous, fondateur de Biosphères.
En grandes cultures, avec un système couverts végétaux dans la rotation, il sera possible de structurer le sol sans labour ou hersage. Une économie de 150 €/ha et qui peut être réinjectée dans les semences de couverts. Ces derniers font remonter le PK, améliorent le statut organique de la parcelle, apportent de la matière organique fraîche et limitent l’érosion.
« Il faut 15 à 20 tonnes de matières sèches par hectare et par an pour renouveler ou conserver environ 3 % de matières organiques. C’est l’objectif que l’on peut atteindre avec une rotation en adaptant les couverts végétaux, le plan de fertilisation et les amendements », souligne-t-il.
Ce ne sera qu’une fois le sol restauré que penser à réaliser des économies sera possible. Sur 100 ha, les 15.000 € d’économies peuvent servir à financer les couverts végétaux. C’est acceptable pour le producteur et c’est accepté en règle générale.
« En arboriculture, c’est un peu différent, car ce sont des cultures pérennes. Le producteur peut réduire ses charges de mécanisation. Cela dit, le côté réglementaire avec la loi abeille nous empêche de travailler correctement le profil pollinique à la parcelle. Il est impossible de diversifier le bol alimentaire des pollinisateurs, car il faut tout broyer au premier traitement », note Sébastien Roumegous.
Où en est la rémunération des agriculteurs en transition ? Selon le projet CarbonThink1, qui cherche à mesurer et évaluer la transition carbone de 100 exploitations agricoles du Grand Est avec un atelier de grandes cultures, le coût du crédit carbone qui rémunérerait vraiment la transition devrait être autour de 80 à 100 €/ha.
(1) Le projet 2019-2022 est cofinancé par la région Grand Est et le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) dans le cadre du Partenariat européen pour l’innovation (PEI).