« Si la proposition m'en était faite, certainement, j'accepterais », avait récemment déclaré Annie Genevard. Mais la députée Les Républicains de la cinquième circonscription du Doubs (depuis 2012), un département laitier et forestier, se voyait plutôt ministre de l'Éducation nationale. Ce sera l'agriculture.
Samedi en début de soirée, Alexis Kohler, secrétaire général de l'Élysée, a enfin annoncé la composition du gouvernement Barnier. Une équipe paritaire de 39 ministres, ministres délégués et secrétaires d'État.
Annie Genevard est donc nommée ministre de l'Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt. Ce sera la troisième femme seulement à prendre ce poste. Avant elle, Edith Cresson l'avait eu (de mai 1981 à mars 1983), de même que Christine Lagarde (un mois seulement en 2007), Quant à Agnès Pannier-Runacher, ancienne ministre déléguée auprès du ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, elle est nommée ministre de la Transition écologique, de l'Énergie, du Climat et de la Prévention des risques.
« Un revenu, de la considération et moins de normes »
« Je travaille pour les agriculteurs depuis bien longtemps », avait fait remarquer Annie Genevard ce samedi lors de sa visite à deux comices agricoles du département du Doubs. De même, à l'occasion de l'émission Bonjour chez vous, sur Public Sénat, elle déclarait, le 25 janvier dernier, à propos de la colère des agriculteurs qu'ils demandaient trois choses : « Un revenu, de la considération et moins de normes. »
Un parcours politique qui remonte à 2002
Fille d'un chef d'entreprise et d'une femme politique (députée du Doubs de 2002 à 2007 et maire de Seloncourt de 1993 à 2015), Annie Genevard est née en 1956 à Audincourt (Doubs). Elle a d'abord été maire de Morteau (de 2002 à 2017), puis présidente (2018-2020) de l'association nationale des élus de montagne. Actuelle secrétaire générale des Républicains et vice-présidente de l'Assemblée nationale, Annie Genevard est certes une élue des territoires, mais, professeure de lettres classiques, elle est davantage spécialiste de l'éducation et de la culture.
Mariée à un pharmacien et mère de deux filles, elle s'engage d'ailleurs régulièrement sur des sujets de société avant tout. Ainsi, en février 2021, elle qualifie d'affligeante l'adoption d'un amendement visant à remplacer les mentions père et mère sur les formulaires scolaires et en juin 2021, elle dépose un recours devant le Conseil constitutionnel contre la loi ouvrant la PMA à toutes les femmes... Et elle semble s'intéresser plus à l'apprentissage de la lecture ou l'utilisation des écrans par les très jeunes enfants qu'à l'agriculture. C'est donc une franche conservatrice – elle a soutenu François Fillon à la présidentielle de 2017 – qui remplace le centriste Marc Fesneau...
Intéressée par les enjeux des zones de montagne
Toutefois, elle est attachée aux enjeux des zones de montagne, et est membre du Comité directeur de l'Anem (Association nationale des élus de montagne) depuis 2012 et elle en a été secrétaire générale, en 2016, puis présidente en 2018. Auteure d'un rapport remis au Premier ministre sur l'acte II de la Loi Montagne en 2015, elle deviendra rapporteure de la loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
Les syndicats agricoles l'attendent au tournant
Les syndicats Jeunes Agriculteurs et FNSEA ont immédiatement réagi à la nomination d'Annie Genevard. « Après la déception des engagements non tenus du précédent gouvernement, Jeunes Agriculteurs et la FNSEA attendent des mesures fortes et immédiates », ont-ils déclaré dans un communiqué. Annie Genevard « sait combien les attentes sont fortes, précise ainsi Arnaud Rousseau, président de la FNSEA. Elle devra marquer son arrivée avec un signal fort pour redonner de l'espoir au monde agricole ».
De façon concrète, les syndicats appellent à « des solutions claires, rapides et précises aux différentes crises qui frappent les agriculteurs » :
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sur le volet sanitaire, au-delà du renforcement des mesures visant à limiter la propagation des virus, l'État doit annoncer un véritable plan d'indemnisation des pertes directes et indirectes liées aux maladies. Il est impensable de laisser des éleveurs seuls pour gérer cette crise ;
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face aux pertes de récoltes dues à l'année climatique exceptionnelle, l'État doit faciliter l'accès à des prêts de trésorerie en permettant des réductions de taux et en apportant une garantie publique.
Renouvellement des générations, Egalim, simplification...
Enfin, au-delà de la gestion de ces crises conjoncturelles, Jeunes Agriculteurs et la FNSEA attendent de la ministre de l'Agriculture qu'elle rouvre d'urgence les chantiers suspendus par la dissolution de l'Assemblée nationale : politique de renouvellement des générations, compétitivité, simplification, moyens de production, suite des lois Egalim, agrivoltaïsme…
Après une réunion informelle des nouveaux ministres, dimanche, le premier Conseil des ministres se tiendra ce lundi à 15 heures.