Les élections des chambres d'agriculture, enjeu clé pour l'avenir du secteur

Lors de sa conférence de rentrée, Sébastien Windsor, président de Chambres d'agriculture France, a dénoncé diverses incohérences de la politique agricole française, dont la séparation vente-conseil et le calcul des taxes foncières. Le contexte actuel rend la représentation des intérêts des exploitants, à l'issue des élections de janvier 2025, encore plus cruciale.

Sébastien Windsor, président de Chambres d'agriculture France, espère que les difficultés actuelles des producteurs les incitent à participer aux élections des chambres d'agriculture en janvier prochain. 

© Cédric SKRZYNIARSZ - Chambre d'agriculture de Normandie

La liste des déboires qui affligent les agriculteurs aujourd'hui ne cesse de s'allonger. Entre une moisson de céréales désastreuse (avec une baisse de production de l'ordre de 25 à 30 % pour le blé, par exemple), une série d'épizooties qui déciment les cheptels et des aléas climatiques qui pèsent aussi sur les récoltes de certains fruits (- 35 % pour les abricots, notamment), sans oublier une consommation toujours atone, en particulier pour le bio, des cours, sur les marchés, souvent en recul et des coûts de production qui, eux, ont du mal à baisser, les producteurs vivent des moments particulièrement difficiles.

Un chiffre d'affaires en forte baisse

Une catastrophe qui va laisser des traces, ne serait-ce qu'au point de vue financier. 

De fait, « certaines exploitations ne feront pas 50 % de leur chiffre d'affaires et mettront des années à s'en remettre », déclare Sébastien Windsor, président de Chambres d'agriculture France.

Pas question, cependant, de baisser les bras. Lors de sa conférence de rentrée, le 11 septembre, il a fait la liste des initiatives déjà en place pour accompagner les exploitants et celles qui restent à lancer.

Un référent pour les assurances

Les chambres d'agriculture ont par exemple chacune mis en place un référent pour les questions d'assurance. Mais la situation actuelle exige un renforcement de ces capacités.

En outre, les difficultés financières que connaissent nombre de producteurs impliquent là aussi un accompagnement plus poussé, en vue de trouver des solutions de trésorerie.

Et, au-delà des actions urgentes, les chambres d'agriculture doivent, toujours et encore, épauler les exploitations dans leur transformation. Des dossiers de long terme, mais qui nécessitent une vision, des moyens et une évolution de certains dispositifs.

Relancer le projet de loi d'orientation agricole

Pour ce faire, Sébastien Windsor attend non seulement la nomination prochaine d'un ministre de l'Agriculture à même de relancer le projet de loi d'orientation agricole, mais aussi les élections aux chambres d'agriculture.

Et si, lors des précédentes, en 2019, le taux de participation, pour le collège 1 (chefs d'exploitation et assimilés), s'est élevé à 46,22 % (et pour la première fois en dessous de 50 %), il espère plus en janvier prochain.

L'accompagnement humain, parent pauvre

Compte tenu de la situation actuelle, la représentation des agriculteurs, à travers les chambres, revêt en effet un enjeu crucial. Il s'agit d'accompagner ces derniers dans la nécessaire transition – énergétique et environnementale – afin de préserver l'avenir du secteur et la souveraineté alimentaire du pays.

« Mais pour cela, il nous faut des moyens. Or l'accompagnement des agriculteurs est devenu le parent pauvre des politiques publiques, alors que c'était l'une des forces de la France il y a encore quelques années », regrette-t-il. Les moyens auxquels il fait allusion sont humains, et par là même, financiers.

Une taxe foncière inégale

Ainsi, en ce qui concerne la taxe foncière sur les propriétés non bâties et, surtout, la taxe additionnelle pour frais de Chambres d'agriculture, si le coefficient de revalorisation affiche cette année une augmentation forfaitaire de 3,9 % de la base de calcul des propriétés bâties et non bâties, du fait d'un plafond imposé aux chambres d'agriculture, ces dernières ne profiteront pas de la hausse, contrairement aux collectivités locales.

« Je suis lassé de devoir discuter de cela tous les ans, soupire Sébastien Windsor, d'autant que l'État nous demande chaque année de faire plus en nous délégant davantage de missions. »

Autre incohérence, la séparation vente-conseil

Mais ce n'est pas la seule incohérence qu'il perçoit de la part de l'État. Au-delà de la loi d'orientation agricole, suspendue pour cause de dissolution de l'Assemblée nationale, qui incluait des mesures de simplification administrative et d'autres pour favoriser l'installation de nouveaux agriculteurs en vue du renouvellement des générations, il critique la séparation entre conseil et vente de produits phytopharmaceutiques (instaurée par ordonnance en vertu de la loi Egalim du 30 octobre 2018).

Non seulement le bilan, dressé par les députés Stéphane Travert et Dominique Potier et présenté le 12 juillet dernier estime que la mesure est, au mieux, contre-productive, mais en plus, ses ramifications se font sentir sur la représentation des agriculteurs dans le cadre des élections aux chambres d'agriculture.

Un « bénéfice mutuel » éliminé

En effet, une personne faisant partie de l'exécutif d'une coopérative peut être élue au sein d'une chambre mais non à son bureau, au nom d'un éventuel conflit d'intérêts.

Or « le bureau est une instance de dialogue, essentielle pour partager études, pratiques de terrain et expériences. Nous perdons ainsi un bénéfice mutuel », insiste Sébastien Windsor. Il donne comme exemple le fait que moins de produits phytopharmaceutiques implique davantage de passage d'engins motorisés dans les champs pour désherber, par exemple, « ce qui entraîne des coûts en matière de fuel », explique le président de Chambres d'agriculture France.

Autant d'éléments qui ne sont pas pris en compte... Et du fait de la situation à l'Assemblée, impossible de penser que cette contrainte sera modifiée avant la constitution des listes ou le vote pour la représentation des agriculteurs.

Incitation au vote

C'est en tout cas une nouvelle vision, plus proche des enjeux de terrain, qu'appellent de leurs vœux les chambres d'agriculture. Seul espoir : que leurs difficultés actuelles incitent davantage d'agriculteurs à voter pour faire entendre leur voix.

La campagne électorale commence le 7 janvier 2025 et se termine le 30 janvier 2025. Les résultats des élections seront rendus publics le 8 février. Le vote en ligne ou électronique se fera sur cette plateforme : www.jevote2025.chambre-agriculture.fr