Avec une population plus soucieuse de sa santé, la Suède enregistre une baisse de la consommation de vin ces dernières années. En parallèle, le pays est l’un des pionniers concernant des emballages avec un impact carbone réduit. Les Suédois sont aussi, en quantité par habitant, les plus grands consommateurs de vins bio. Les habitudes changent, avec une demande de plus en plus portée sur des vins « durables ».
Les deux dernières années ont été fastes pour le monopole d’État suédois. Les magasins étaient les seuls à délivrer de l’alcool. Sans restaurants ni bars et achats transfrontaliers, les ventes ont augmenté. Pourtant, les autorités l'affirment : les Suédois n’ont pas bu plus durant la période de Covid. D’après une étude menée auprès d’un panel de consommateurs, 70 % des répondants annoncent avoir bu autant, 10 % avoir plus consommé d’alcool et 20 % l’avoir réduit. La pandémie n’aura donc pas infléchi une tendance qui devient structurelle : celle de la baisse de consommation d’alcool dans le pays.
Récemment, le cabinet Wine Intelligence s’est penché sur le cas suédois, notant que la consommation globale a, sans surprise, suivi le nombre total de buveurs, montrant une légère baisse en 2021, par rapport à 2020, passant de 25,1 millions de caisses à 24,9 millions. « Désormais, un peu moins de la moitié de la population (3,8 millions de personnes) est classée comme buveurs réguliers de vin, ce qui signifie qu'ils boivent du vin au moins une fois par mois. C'est un demi-million de moins qu'en 2017. Cette mauvaise nouvelle est quelque peu atténuée par le fait que le nombre de ceux qui boivent du vin une fois par semaine ou plus est globalement resté stable au cours de la même période », indiquent les analystes de Wine Intelligence.
Un vin sur cinq est bio
Cette situation baissière est préjudiciable pour certains vins rouges ; les Suédois privilégient de plus en plus des vins plus légers et pétillants et s'éloignent des rouges plus corsés, ce qui nuit aux pays producteurs du nouveau monde. Le Chili, l'Afrique du Sud et l'Australie affichent déjà une croissance négative par rapport à 2019, et le dernier rapport de Wine Intelligence suggère que ces trois pays, mais aussi l'Argentine, vendront moins de vin en Suède au cours des cinq prochaines années.
Sans surprise, les vins s’inscrivant dans une démarche environnementale connaissent un certain succès. Comme le précise le monopole Systembolaget dans son rapport annuel : « Les Suédois, et en particulier les jeunes consommateurs, sont exceptionnellement conscients et soucieux de l'environnement, ce qui crée une demande croissante pour des vins durables et éthiques. Les consommateurs se soucient de l'origine du vin importé, ainsi que des méthodes de production, de distribution et de certification. Les ventes de vins bio très appréciés se sont élevées à 50 millions de litres en 2019 et continuent de progresser."
Rapportés au nombre d’habitants, les Suédois sont les premiers consommateurs (et de loin) de vin bio au monde. Et ils consomment deux fois plus de vin bio que les Autrichiens, deuxièmes du classement (source : WineGourd). Ainsi, plus de 22% des ventes de vin du monopole étaient en 2020 d'origine biologique, contre 6% dix ans plus tôt (source Ad’Occ).
Selon le Wine Intelligence Global Opportunity Index, la Suède se classe au deuxième rang (derrière la Chine) en matière de potentiel de développement du vin bio. Le pays bénéficie non seulement des normes éthiques et soucieuses de la santé de la population dans son ensemble, mais aussi du fait que le plus grand détaillant du pays est géré par le gouvernement. « Plus de 85 % de tous les vins du commerce de détail suédois sont vendus par le biais du Systembolaget, et ce dernier a fait du bio une priorité essentielle. Environ 80 % des buveurs de vin suédois connaissent le vin biologique et plus de 40 % ont acheté au moins une bouteille l'année dernière. Avec une population réceptive et l'État qui la pousse, les ventes de vin biologique sont presque certaines d'augmenter à l'avenir », prédisent les analystes.
La chasse au CO2
Pour la Suède, l’usage des produits phytosanitaires de synthèse est cependant loin d’être le seul critère de durabilité pris en compte dans les politiques gouvernementales. Au pays de la jeune militante Greta Thunberg, le changement climatique n’est pas ignoré. Et, de plus en plus, Systembolaget contraint les fournisseurs sur l’impact environnemental des contenants de vin. Le monopole entend pour l’année prochaine réduire l'empreinte climatique de ses emballages de 10 % par rapport aux émissions de 2019, ce qui correspond à environ 15 000 tonnes de dioxyde de carbone.
Pour cela, Systembolaget a développé en 2021 la notion d’emballages à empreinte climatique moindre par rapport aux bouteilles en verre traditionnelles. Sont compris dans cette catégorie d’emballages dit "climato-intelligents" : le BIB, le verre consigné, la canette aluminium, la bouteille PET et les bouteilles en verre allégé. Dans les magasins, les références compatibles avec cette catégorisation sont mises en avant et 21% de l’offre de monopole serait climato-intelligente. Et pour que ces emballages ne soient pas associés à des vins d'entrée de gamme, le monopole s’applique à proposer des boissons dans des segments de prix plus élevés conditionnés dans les emballages en canette, en PET ou en BIB. L’ambition forte du monopole semble porter ses fruits : « Davantage de clients ont choisi des boissons conditionnées en PET, en canettes d'aluminium ou en emballages en carton. Huit de nos dix nouveautés les plus vendues le sont dans un emballage climato-intelligent », peut-on lire dans le rapport de développement durable 2021.
Sur ce segment, le négociant Miguel Torres Chili s’est ainsi distingué en lançant pour le marché suédois une référence de vin rouge bio de carménère, conditionné sous bouteille en plastique recyclé plate. Río Claro devient ainsi la troisième référence de vin à être lancée à Systembolaget dans des bouteilles plates, légères et recyclables, fabriquées de l’autre côté de l’océan Pacifique en Australie.