En s'appuyant sur ApexVigne et ses utilisateurs, l’Institut Agro Montpellier a pu dresser une cartographie de l’état hydrique de la vigne dans deux régions du sud de la France. Un outil qui pourrait aider les vignerons dans les décisions liées à l'irrigation.
Grâce à sa thèse consacrée au « développement d’une approche de crowdsourcing adaptée aux spécificités de l’agriculture », Léo Pichon, enseignant-chercheur à l’Institut Agro Montpellier, a montré qu’il était possible de produire une cartographie régionale de l’état hydrique de la vigne en s’appuyant sur une collecte collaborative de données. « À ce jour, il existe peu d’outils permettant de réaliser un tel suivi à l’échelle régionale, a-t-il fait remarquer lors de la journée TerclimPro organisée fin avril près de Bordeaux. Il y a la modélisation et la télédétection, mais ce sont des dispositifs lourds et dont les résultats sont très hypothétiques. »
Le chercheur a donc fait l’hypothèse qu’en s’appuyant sur une communauté de contributeurs, viticulteurs et conseillers techniques, la collecte collaborative de données pouvait peut-être donner des résultats plus probants. Sa recherche s’est concentrée sur deux territoires : une « grande région » qui s'étend des Pyrénées-Orientales jusqu'au Var en passant par la Drôme et l'Ardèche et une « petite région » composée des Côtes du Rhône et des Costières de Nîmes. « J’ai choisi ces zones d’étude pour leurs nombreux vignobles et leur climat méditerranéen. Le déficit hydrique y est structurel et le suivi de l’état hydrique est un enjeu fort », précise Léo Pichon.
Outil d’aide à la décision
La collecte de données s’est appuyée sur l'application ApexVigne. Développé par l’Institut Agro Montpellier et l’Institut français de la vigne et du vin d’Occitanie, cet outil aide à caractériser l’état hydrique de la vigne par sa croissance végétative. Basée sur l’observation de l’extrémité des rameaux, la méthode est assez simple. Elle consiste à observer 30 à 50 apex et à les classer selon trois catégories : pleine croissance, croissance ralentie ou croissance arrêtée. En entrant ces informations dans l’application, le viticulteur ou le conseiller technique accède à une description de l’état de la croissance végétative et à une interprétation du niveau de contrainte hydrique pour chaque parcelle.
Lancée en 2019, l’application a collecté quatre saisons d’observations. Le nombre d'observations varie d’une année sur l’autre, selon la sécheresse. 1 200 relevés ont été réalisés en 2021 – le nombre le plus bas – contre plus de 3 000 en 2022. « Il faut au moins une centaine d’observations pour avoir une estimation pertinente », précise Léo Pichon. Grâce aux données collectées, ce dernier a obtenu une carte mettant en évidence l’évolution de la croissance végétative, et à travers elle, une image du niveau de contrainte hydrique à l'échelle des deux zones d’étude choisies. « Cela ne donne aucune préconisation d’actions, c’est un outil pour aider le viticulteur à piloter son irrigation et à prendre sa décision », souligne l’enseignant-chercheur, indiquant qu’il y avait « des complémentarités à développer avec d’autres modes de détection ».
Totalement gratuite, l'application ApexVigne n'est aujourd'hui disponible que sur Android. Après l'avoir téléchargée, l'utilisateur enregistre les parcelles qu'il souhaite suivre. Puis il renseigne ses observations en cliquant sur l'un des trois niveaux de croissance matérialisés par des photographies. Il est recommandé de réaliser quatre à cinq relevés sur 30 à 50 apex. Le premier dix jours après la floraison, puis tous les dix jours environ. Selon les concepteurs de l'application, cette technique demande environ cinq minutes d'observation par parcelle. L'application se charge ensuite de calculer l'indice d'arrêt de croissance et, ainsi, d'estimer la contrainte hydrique.