« Nous n’avons pas un unique programme d’adaptation au changement climatique, mais tous nos programmes comprennent un tel volet », explique Sébastien Debuisson, directeur du Comité Champagne.
L’adaptation au changement climatique peut être abordée à deux échelles : court terme et long terme.
« À court terme, nous travaillons sur la modélisation Stics développée par l’Inrae d’Avignon pour mieux piloter la gestion du vignoble, indique le directeur. Stics permet de fournir des indicateurs du fonctionnement sol-plante-atmosphère à l'échelle de la parcelle. »
L’objectif est de réagir aux conditions de chaque millésime, en adaptant les pratiques au vignoble, de prendre en compte la forte variabilité annuelle et de réagir immédiatement. « Avant, en Champagne, la pluviométrie était constante, poursuit-il. Nous avions 60 mm tous les mois, alors que désormais les pluies sont sous forme d’orages, avec des cumuls d’eau plus importants. De même, nous pouvons subir une sécheresse comme en 2023 ou des pluies extrêmes comme en 2024. »
« Il y a 30 ans, par exemple, nous n’observions jamais de phénomène d’échaudage, témoigne Sébastien Debuisson. Aujourd’hui, selon les années on peut avoir 10 à 15 % d’échaudage, comme en 2019 ou 2021. Une gestion spécifique de la canopée peut être une réponse aux conditions de certains millésimes. Stics va nous y aider. Les expérimentations sont en cours et le modèle devrait être accessible prochainement pour les viticulteurs champenois. »
Création variétale
À long terme, le vignoble champenois s’attelle au matériel végétal. Deux pistes sont poursuivies en parallèle : mieux valoriser la diversité intravariétale existante, mais aussi la création variétale.
« Toute la diversité intravariétale n’est pas ou plus exploitée. Dans nos programmes, nous avons mis en place des index de sélection qui prennent en compte les caractéristiques liés au changement climatique. Ainsi, les variétés qui débourrent plus tôt que le chardonnay ne reçoivent pas une note favorable. Nous recherchons des variétés au débourrage plus tardif, au cycle plus long, et doté d’une réserve en acidité », précise-t-il.
La Champagne développe son propre programme de création variétale, baptisé « Cepinnov », en collaboration avec la Bourgogne, dont les premières obtentions sont espérées pour 2030-2032. Il s’attache notamment au croisement des variétés Resdur avec les variétés champenoises : pinot noir, arbane, petit meslier, pinot meunier, chardonnay.
Côté œnologie, les travaux se focalisent sur la microbiologie. « Notre matrice vin évolue et cela peut générer des déviations. Les fortes températures observées ces dernières années lors des vendanges incitent à retravailler l’hygiène. Nous nous intéressons également aux arômes non souhaités de "de millésimes secs" : ils sont liés à l’état physiologique de la vigne et l’objectif est d’identifier les pratiques qui peuvent les limiter », conclut Sébastien Debuisson.
À noter que dans le cadre de Vitilience – projet financé par le Casdar et porté par l’IFV –, la Champagne devrait se doter d’un, voire deux démonstrateurs régionaux pour l’adaptation et l’atténuation du changement climatique.