L’hébergement des vendangeurs est devenu une problématique croissante, à la fois pour le recrutement des saisonniers, mais aussi en matière d’image. En Bourgogne, près de 50.000 vendangeurs viennent chaque année pour récolter manuellement le raisin. Recruter des vendangeurs devient de plus en plus difficile, et le défaut d’hébergement revient souvent comme le principal frein cité.
« L’hébergement constitue le premier point de blocage pour le recrutement des vendangeurs en Bourgogne, rappelle Mélanie Grandguillaume, responsable juridique et accompagnement de la Confédération des appellations et vignerons de Bourgogne (CAVB). Héberger au domaine est la solution la plus évidente, mais la réglementation et les normes à respecter ne facilitent pas la pratique dans les faits.
Bâtiments plus aux normes
« Dans les vignobles septentrionaux, contrairement aux vignobles du sud de la France, l’hébergement sous tente n’est pas autorisé pour les vignerons, en raison d’un arrêté de 1996, qui n’a d’ailleurs plus vraiment lieu d’être – et nous militons en ce sens –, les conditions ayant évolué avec le réchauffement climatique et la pression foncière croissante. De nombreux domaines possèdent bien des bâtiments mais ils ne sont pas ou plus aux normes, et cette remise aux normes nécessiterait parfois plusieurs centaines de milliers d’euros pour une utilisation de seulement quelques semaines par année. Les conditions d’hébergement requises pour un vigneron sont même plus strictes que dans le secteur professionnel de l’hôtellerie : par exemple, l’emploi de lits superposés est interdit, alors qu’un hôtel a cette possibilité », souligne Mélanie Grandguillaume.
Un frein au recrutement
Conséquence de cet état de fait, de plus en plus de domaines ne proposent pas le logement à leurs équipes de vendangeurs, se privant de ce fait d’un vivier de candidats non véhiculés ou trop éloignés géographiquement.
Ce manque d’hébergement freine certains recrutements et occasionne des campings sauvages et des situations que la filière ne cautionne pas. Pour tenter d’y remédier, la CAVB et les services de l’État ont mis en place, en 2023, un village de vendangeurs éphémère, expérimenté à Morey-Saint-Denis, en Côte-d’Or.
Il a été mis en place avec l’aide d’un gérant de centre équestre, disposant d’un terrain, avec eau et électricité, complété par la location de douches et de sanitaires. « Les domaines n’ont pas la possibilité, même indirecte de payer un camping pour l’hébergement de leurs salariés. Il a donc fallu que les domaines concernés fassent une avance sur salaire », explique Mélanie Grandguillaume.
Sur 15 jours, une centaine de personnes ont ainsi bénéficié du dispositif. « 100 places pour 50.000 vendangeurs, nous sommes bien évidemment très loin du compte, mais cela permet d’éviter certaines situations critiques », estime-t-elle. Cependant, la mise en place d’un tel dispositif demande organisation et logistique.
Gérer un village de vendangeurs ne s'improvise pas
« Il faut trouver une parcelle, que les communes soient d’accord, disposer d’un accès à l’eau, à l’électricité, et sur le terrain, il est également nécessaire de s’occuper de la gestion des vendangeurs : les inscriptions, l’accueil… Gérer un village de vendangeurs revient à tenir un camping, et nécessite une personne sur place en permanence, un veilleur de jour comme de nuit pour assurer la sécurité, de nettoyer les douches, les toilettes… » précise Mélanie Grandguillaume.
Pour 2024, La CAVB, les services de l’État et le gérant du centre équestre travaillent à la reconduite et au perfectionnement de cette expérimentation. « Mais ce n’est pas la meilleure année pour ce type de projets : avec la concurrence des Jeux olympiques, il n’est pas toujours évident de trouver des sanitaires mobiles par exemple », résume-t-elle.
Des mobil-homes réservés aux saisonniers et cofinancés
Dans le département du Rhône, la communauté de communes du Pays de l'Arbresle s'implique dans le logement des saisonniers agricoles, En partenariat avec la Région, la collectivité finance des mobil-homes qui seront implantés sur les exploitations agricoles. Les agriculteurs financent seulement la moitié de l'investissement.
En contrepartie, ils s'engagent à ne loger que des saisonniers. Pas de touristes et pas de travailleurs détachés. Les agriculteurs peuvent en revanche louer les mobil-homes à des confrères ayant des besoins de logements pour leurs propres saisonniers.
Cette année, quatre entreprises ont adhéré pour une vingtaine de mobil-homes. Un contrat de 15 ans lie les trois parties.