Prairies : Un semis direct pour doper les rendements

Pour Thierry Mouchard,  le choix  des espèces  et du matériel est essentiel  à la réussite  du semis direct en prairie vivante. © Léa Fréhel
Depuis cinq ans, Thierry Mouchard, éleveur d’aubracs dans les Deux-Sèvres, sème des mélanges de céréales et de légumineuses en direct dans ses prairies. Cette technique, adaptée aux contraintes de l’exploitation, augmente la productivité de ses prairies de façon durable et, par la même occasion, génère une récolte annuelle d’enrubannage.

«Tous les ans, je sème un mélange de céréales légumineuses en direct dans la prairie. Cette année, j’ai récolté plus de six tonnes de matière sèche, autant que sur mes parcelles de méteil», se félicite Thierry Mouchard en désignant les trente-quatre bottes d’enrubannage dispersées dans sa prairie en cette fin mai.

Au sol, les derniers andains composés de vesce, d’avoine, de seigle et d’autres graminées seront bientôt enrubannés.

Il y a cinq ans, Thierry Mouchard a repris la ferme de la Solive, située à côté de Niort (79). Pour nourrir son troupeau d’aubracs, il produit des fourrages grossiers, foin et enrubannage, sur 47 hectares.

En plus des fourrages autoproduits, cet éleveur bio achète chaque année une coupe de douze hectares de luzerne. Pour limiter ses achats extérieurs, Thierry Mouchard valorise au mieux l’existant.

«J’ai mis en place le pâturage tournant dynamique. L’une de mes prairies a un fort potentiel, mais jusqu’à présent, son fonds prairial était composé uniquement de graminées. En vue d’améliorer le pâturage sur cette prairie, j’ai souhaité y ajouter du trèfle», explique le producteur.

Pour implanter cette légumineuse, l’éleveur a opté pour le semis direct sur prairie vivante. Chaque année, une partie de la grande parcelle est ensemencée.

Et pour amortir le coût du semis, réalisé par une entreprise de travaux agricoles, Thierry Mouchar a décidé d'ajouter de la vesce commune et des céréales aux trèfles.

« Ainsi, j’implante avec ma légumineuse un mélange que je récolte sous forme d’enrubannage. Chaque année, j’ensemence environ deux hectares, ce qui correspond à cinq ou six paddocks de 80 ares chacun », précise l’éleveur.

Choisir des variétés agressives pour concurrencer la prairie

Pour Thierry Mouchard, le choix
des espèceset du matériel est essentiel. 

Le choix des espèces est essentiel. En effet, les fourragères implantées doivent supporter la concurrence avec la prairie.

« Pour composer mon mélange1, je sélectionne le caractère agressif des fourragères. Le trèfle blanc et la vesce sont parfaitement adaptés. En revanche, l’avoine se développe de façon irrégulière. Malgré tout, cette céréale améliore la qualité du fourrage. Pour pallier cette irrégularité, j’ai intégré cette année du seigle dans mon mélange. Je ne regrette pas, car cette espèce produit beaucoup de biomasse », expose l’éleveur.

Pour la campagne 2023, son mélange était composé d’avoine noire, de seigle fourrager et pour les légumineuses, de pois fourrager Arkta, de vesce commune et de trèfles blancs, Alice et Huïa.

En réalité, ce mélange n’est jamais le même d’une année à l’autre, car il évolue en fonction des observations des années précédentes.

D’après l’éleveur, le choix des espèces n’est pas le seul facteur de réussite. Le type de matériel revêt aussi une grande importance.

«Les premières années, l’entreprise intervenait avec un semoir à disque. Depuis 2021, cet outil a été remplacé par un semoir à dent. Les dents creusent dans le couvert un sillon en forme de "T inversé". La graine, elle, est placée à 4 cm de profondeur. Avec ce nouveau matériel, la levée est bien plus homogène et dense», déclare Thierry Mouchard.

Si le choix du matériel et des espèces est décisif, l’éleveur a aussi appris que le broyage avant le semis ne présente pas d’intérêt particulier :

«En 2022, j’ai broyé une partie de la parcelle juste avant le semis. Cette opération visait à affaiblir le couvert, mais n’a eu aucun effet significatif, ni sur la levée, ni sur la récolte.»

Pour finaliser le semis, Thierry Mouchard effectue un passage de rouleau et n’intervient plus jusqu’à la récolte.

Des rendements comparables à ceux d’une parcelle de méteil

Production 2022 des prairies semées : 5,5 tonnes d'enrubannage
et 3 tours de pâturage. © Photos : Léa Fréhel / Téma

La fauche a lieu à la fin du mois de mai. Trois jours plus tard, le mélange est enrubanné.

« En 2022, la récolte était de cinq tonnes de matière sèche et j’ai pu reprendre le pâturage dès le 8 juillet suivant. Cette année, les rendements sont de plus de six tonnes de matière sèche. J’espère réaliser au moins trois tours de pâturage dans ces parcelles avant l’hiver prochain », anticipe Thierry Mouchard.

Pour lui, cette technique vise d’abord à implanter du trèfle dans la parcelle. En plus d’améliorer la qualité du fourrage, cette légumineuse offre à la prairie une meilleure résistance à la sécheresse.

« Après deux années de pâturage, j’ai vu le trèfle blanc se développer dans la prairie, sans pour autant prendre le dessus. Cette légumineuse est très appétente, elle augmente la consommation du fourrage par les animaux. De plus, elle favorise la pousse des graminées et reverdit rapidement après un épisode de sécheresse. L’implantation de ce mélange améliore durablement l’autonomie de l’exploitation », déclare le producteur.

Un fourrage idéal pour les vaches en fin de gestation

Le fourrage obtenu est distribué aux vaches en fin de gestation. D’après l’éleveur, ce fourrage appétent n’engraisse pas trop les animaux et facilite donc le vêlage.

En revanche, le producteur rationne l’enrubannage des vaches en lactation. Il détaille ses observations :

« Je rencontre plus de soucis digestifs sur les veaux non sevrés, si bien que j’en suis venu à limiter ce fourrage pour les vaches suitées, car je pense qu’il agit sur la qualité du lait. Depuis, je rencontre moins de problèmes. »

En 2022, alors même que la sécheresse a été importante, le gain moyen quotidien enregistré entre la naissance et le sevrage des veaux était de 1182 grammes pour les femelles et de 1203 grammes pour les mâles.

Thierry Mouchard s’avoue très satisfait de la qualité de ses fourrages. D’autant plus qu’il ne distribue aucun concentré.

La Ferme de la Solive

  • Situation : À côté de Niort, dans les Deux-Sèvres.
  • Installation de Thierry Mouchard en 2019
  • en agriculture biologique.
  • Troupeau : 31 vaches allaitantes de race aubrac et leur suite : 30 veaux, 10 génisses de plus de 2 ans, 8 génisses d’un an, 8 bœufs, 2 mâles reproducteurs.
  • Commercialisation : Vente directe uniquement.
  • 16 hectares de cultures de vente (soja, mélange blé tendre-pois protéagineux, mélange triticale-pois fourrager).
  • 47 hectares de cultures fourragères et de prairies (dont 13 ha de prairies permanentes, 25 ha de prairies temporaires, 5 ha de méteil, 3,5 ha d'un mélange luzerne fléole et 0,5 ha d'un mélange sainfoin-plantain-lotier).

(1) Composition du mélange semé le 19 octobre 2022 : 40 kg d’avoine noire, 30 kg de seigle fourrager, 20 kg de pois fourrager Arkta, 20 kg de vesce commune, 3 kg de trèfle blanc Alice, 1 kg de trèfle blanc Huïa, 0,8 kg de plantain lancéolé.

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