
L’Inrae, l’Institut de l’élevage ont dévoilé, à l'occasion des Rencontres recherches ruminants, les résultats issus de l’expérimentation « Quelle vache pour quel système », conduite durant dix années sur le domaine Inrae du Pin-au-Haras (Orne). Elles ont ainsi été utilisées pour évaluer à l’échelle du système d’élevage, l’influence de six facteurs, dont la stratégie d’alimentation ou la race sur les performances environnementales de l’élevage.
160 systèmes-types d’élevages
En effet, en élevage bovin, près de 50 pratiques différentes ont été identifiées comme favorables à la réduction des GES et à l’amélioration de l’efficience de l’azote. Mais ces pratiques, plus ou moins efficaces, sont rarement combinées à l’échelle du système d’élevage complet. C’est pourquoi, 160 systèmes-types d’élevages laitiers ont été construits à partir des données de l’expérimentation, avec un objectif commun de produire un volume annuel de lait de 420 000 litres.
6 facteurs pris en compte
Les facteurs introduits dans la définition des systèmes-types sont la race (holstein ou normande), l’âge au premier vêlage (24 ou 36 mois), le type génétique (potentiel favorable à la production laitière au détriment de la concentration en matières utiles ou inversement), le système d’alimentation, soit « Bas », un système autonome, exclusivement basé sur l’herbe ensilée et pâturée, sans apport de concentré soit « Haut », un système qui vise à exprimer le potentiel des animaux, avec une ration intégrant de l’ensilage de maïs en hiver et de l’herbe pâturée en été, avec une complémentation en concentrés de 1600 kg par lactation. La stratégie de vente des génisses en excès du renouvellement a aussi été étudiée (à 15 jours ou amouillante) et le taux de renouvellement (de 20 à 40% par tranche de 5%) ont également été intégrés. Au total, l’agrégation de ces 6 facteurs composés de 2 à 5 modalités a abouti à la construction de ces 160 systèmes-types laitiers.
Une empreinte carbone nette du lait plus faible pour les prim’holstein
Il est observé que les systèmes basés sur les vaches de race holstein affichent des émissions brutes de GES et une empreinte carbone nette du lait significativement plus faibles que les systèmes conduits en race normande. En effet, même si les émissions de méthane entérique par vache sont plus faibles en race normande, la démographie du troupeau caractérisée par un effectif plus important (+ 19 vaches, en moyenne) induit des émissions de GES accrues, qu’elles soient exprimées par litre de lait ou par kg de protéines produites sur le système, en prenant ou non en compte le stockage de carbone. À noter que dans le cadre de cette étude, les systèmes construits autour de la race Normande sont pénalisés par le niveau de production de lait individuel plus faible qui nécessite des effectifs plus importants pour un même volume de lait livré, insuffisamment compensé par le produit viande supplémentaire associé.
Moins de risque de lessivage avec le système d’alimentation « Bas »
Concernant l’alimentation, le système d’alimentation « Bas », exclusivement basé sur l’herbe, sans apport de concentré, induit des émissions de GES supérieures au système « Haut » intégrant de l’ensilage de maïs et des concentrés protéiques, et ce quelle que soit l’unité fonctionnelle utilisée. Toutefois, en intégrant le stockage de carbone, l’empreinte nette par litre de lait vendu et l’empreinte nette de la protéine produite sur les élevages - types en alimentation « Bas » sont significativement plus faibles. Une tendance similaire est également observée sur les flux d’azote. Malgré un excédent du bilan apparent plus important en système Bas, les risques de lessivage sont significativement inférieurs.
Une empreinte carbone nette de 0,91±0,12 kg eqCO2/l.
L’évaluation environnementale de ces systèmes a été réalisée avec l’outil CAP’2ER, pour déterminer les émissions brutes de GES, l’empreinte carbone nette du lait, ainsi que le bilan apparent de l’azote et quelques indicateurs associés. Sur l’ensemble des simulations réalisées, les émissions brutes de GES sont en moyenne de 1,18±0,08 kg eqCO2/l de lait et l’empreinte carbone nette est de 0,91±0,12 kg eqCO2/l. Le bilan apparent moyen de l’azote est de 146±10 kg N /ha.
La stratégie d’alimentation et race seuls facteurs qui ont de l’effet
Seul l’effet « stratégie d’alimentation » et notamment l’absence de concentré protéique et la modalité « holstein » affichent conjointement des émissions brutes de GES et une empreinte carbone nette plus faibles. La stratégie à base d’herbe pâturée sans concentré conduit cependant à un bilan apparent de l’azote plus élevé (différentiel de +7 kg N/ha), mais le risque lessivage de l’azote lié à cette stratégie à bas-intrants alimentaires est significativement plus faible (différentiel de -27 kg N/ha) du fait d’une surface en prairies permanentes accrue. Cette analyse confirme l’intérêt d’une vision intégrative des leviers d’actions à l’échelle du système d’élevage tout en soulignant la nécessité de compromis environnemental face à la diversité des impacts évalués.