La richesse minérale des sols est dans l’argile vivante !

Nodules ferro-manganiques dans une argile forte non oxygénée. PHOTOS : Frebourg Agro-Ressources

Au détour des nombreux profils de sol qu’il réalise, Christophe Frebourg, président de la société de conseil Frebourg Agro-Ressources, entend souvent les producteurs parler tristement de l’argile. Ils l’appellent « la mauvaise terre à ne surtout pas remonter à la surface » ou encore « celle qui se travaille très mal ». Il juge nécessaire de remettre les choses à leur place sur ce sujet mal connu.


La qualité des argiles – constituées de feuillets – est définie par la surface interne de l’ensemble des feuillets par gramme. Elle peut être mesurée par un microscope électronique. Les valeurs varient de 80 m²/g à 800 m²/g ! Sachant que l’argile stocke les minéraux et l’eau entre ses feuillets, plus la surface est grande plus la capacité de stockage est importante.

Argile du Ségala (Aveyron) qui présente ici un aspect collant par manque  de vie du sol.
Au-delà de ces valeurs, les argiles offrent un véritable éventail de couleurs. Et chaque couleur est dépendante de sa prédominance minérale. On peut citer plusieurs sortes d’argile : la kaolinite (une argile blanche), l’illite (une argile non gonflante) et la montmorillonite (une argile verte de grande qualité). Il en existe bien d’autres et toutes n’ont pas les mêmes propriétés. Ne demandons pas à une kaolinite de fournir autant de minéraux qu’une montmorillonite dont la capacité de stockage est dix fois plus importante.

L’argile est très riche mais les minéraux sont souvent indisponibles pour les plantes par manque de vie microbienne et d’oxygène. De surcroît, elle est imperméable à l’eau par manque de porosité et d’humus, et dans ce cas-là c’est un véritable enfer pour l’agriculteur ! Il est alors souvent impossible de cultiver sans drainage mécanique. Cette matière à l’état pur reste toutefois très difficile à travailler : en cas de rupture hydrique, elle devient très dure ; avec un excès d’eau, elle est collante. En fait l’argile est vivante, voire capricieuse ! On pourrait dire que sa fertilité physique est « à géométrie variable ».

De l’humus, des racines et de la vie pour de l’argile de qualité

Une argile de qualité est toujours douce au toucher quelle que soit la météo ! Ce n’est pas par hasard si cette matière est utilisée en thalassothérapie et pour la santé. Cette richesse pour l’homme l’est tout autant pour les plantes qui peuvent faire pénétrer leur système racinaire dans un milieu argileux de qualité. En revanche, une argile qui n’est pas capable de stocker de l’eau – par déficience humique – en période humide est une véritable colle, car avec peu de porosité et par conséquent une eau qui reste libre. En période de déficit hydrique, l’argile vous agresse les mains, elle est rugueuse ! Le simple fait de prendre une motte d’argile dans les mains permet de réaliser ce premier diagnostic.

Tous les sols créent de l’argile

Si vous avez l’opportunité de réaliser un profil de sol à deux mètres, prenez le temps d’observer et surtout de toucher ! Vous serez très surpris de découvrir à quel point nous sommes capables d’apprécier avec nos sens la qualité de la terre et des argiles !

Limon argileux sur « chacres » (calcaire local)  en Eure-et-Loir faisant preuve de peu de brassage.
Pour obtenir des argiles de qualité, il faut revenir aux fondamentaux du sol et tout mettre en œuvre pour améliorer l’humification en surface mais aussi en profondeur par une investigation de ces horizons par la vie microbienne, la macrofaune et les racines qui descendent à mesure que la vie et l’oxygène descendent en profondeur. Dans certains cas, un travail sur l’amélioration de la fertilité biologique des terres argileuses difficiles aurait sans doute pu éviter un drainage mécanique.

Un sol qui fonctionne bien est un sol qui, par sa richesse biologique, crée en permanence de l’humus. Il y a alors formation d’acide humique, d’acide fulvique et d’humine. Ces acides qui, tout doucement, descendent en profondeur renforcent l’action des exsudats racinaires – des acides organiques très puissants – pour attaquer la roche et créer 3 à 5 t/ha/an d’argile sur deux mètres de profondeur. Ces argiles néoformées sont de qualité.

Richesse en profondeur

Créer du sol, c’est créer de l’argile et améliorer son capital. Il est donc indispensable d’optimiser au maximum le système racinaire des cultures par amélioration de la fertilité biologique des sols en profondeur pour l’enrichir. La richesse est en profondeur. Au cours de toutes mes expertises de sol, j’ai pu observer ce phénomène sur tous les types de roches. Néanmoins, le calcaire et le sable évoluent plus vite que le granit ou le gneiss.
Ce phénomène est naturel. Regardez les arbustes qui poussent à même certaines falaises sans terre ! Ce n’est pas un miracle, ils créent simplement leur propre terre avec leur système racinaire.

 

Profil

Pour aller plus loin

Trois horizons et pas un de plus…

De manière très simple, il existe trois parties dans le sol : l’horizon travaillé épais d’environ 30 centimètres, constitué d’éléments fins à très fins (limon, argile et sable). Depuis que l’agriculteur travaille ses sols, il a tout mis en œuvre pour que cet horizon soit le plus meuble possible afin que les semis et les plantations germent et lèvent au plus vite. Aujourd’hui avec le semis direct sous couvert, cet horizon n’est plus travaillé ! Nous trouvons ensuite l’horizon sous-jacent dans lequel le système racinaire doit s’installer. Il est situé juste sous l’horizon travaillé. Son épaisseur est très variable, de 0,5 m à parfois 2 m et plus. Il est bien souvent constitué d’argile pure ou en association avec des sables ou des pierres. Ce n’est pas une mauvaise terre puisqu’elle va servir à alimenter les plantes en différents minéraux et en eau. La troisième partie, le fond, est un horizon pas encore exploré par les racines mais qui pourrait l’être un jour. Il est le lien entre la roche-mère et les deux horizons supérieurs pour leur fournir des minéraux du moment que le milieu est oxygéné et vivant. Ce milieu n’est pas exploré par le système racinaire par manque d’activité biologique. Le système racinaire s’arrête de façon très nette car l’horizon est fermé, c’est-à-dire très compacté, sans aération ni porosité, avec un aspect minéral pur.
C’est la façon la plus simple d’identifier un profil de sol sur deux mètres et plus. Et c’est vers cette organisation que le profil doit tendre, avec une connexion optimisée entre ces trois univers. Or, les expertises révèlent parfois jusqu’à huit horizons bien séparés et déconnectés les uns des autres par manque de brassage par une faune du sol souvent insuffisante. On retrouve généralement de l’argile dans tous les horizons avec des teneurs très variables. La teneur maximale se trouve dans l’horizon sous-jacent là où il y a le plus de racines, donc là où il y a beaucoup d’exsudats racinaires qui attaquent la roche pour créer des argiles néoformées.

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