La méthanisation a connu un essor certain ces dix dernières années. En 2020, on dénombre 704 unités contre 31 seulement en 2010. Et la technologie a elle aussi évolué au cours de la décennie. Au début des années 2000, les projets étaient essentiellement développés via la cogénération qui consiste à produire de la chaleur et de l’électricité à partir du biogaz. Désormais ce sont surtout les projets à injection (injection de biogaz purifié dans le réseau de gaz naturel), qui sont privilégiés, précise une analyse du centre d’étude et de prospective du ministère de l’Agriculture.
Ce même ministère a financé, en 2019, une étude qui s’intéresse à la contribution de la méthanisation aux revenus des agriculteurs. Cette étude baptisée Métha’Revenus s’intéresse aux niveaux de revenus générés, les catégories d’agriculteurs concernés et les conséquences des évolutions techniques de la filière.
Afin de comparer les différents systèmes, un indicateur de revenu courant avant impôt (RCAI) de l’unité de méthanisation a été créé. Il est rapporté à la puissance théorique de l’unité exprimée en kWe (kilowatt électrique), en multipliant par quatre les puissances théoriques évaluées en Nm3 des unités en injection, précisent les auteurs. Selon l’étude, le travail de terrain a permis d’identifier quatre idéotypes d’activité de méthanisation.
À travers leurs études, les auteurs font le constat que les céréaliers sont mieux placés que les éleveurs pour porter des projets de méthanisation par injection. Les unités en injection ont connu un fort développement ces dernières années. Or, ce sont des projets qui nécessitent des investissements plus élevés (4,8 millions d’euros en moyenne pour les projets à injection, contre 1,9 million d’euros pour la cogénération). Les auteurs estiment que de tels investissements sont plus supportables financièrement par les céréaliers que par les éleveurs. Par ailleurs ce sont souvent des projets de plus grandes envergures, nécessitant des tonnages plus facilement atteignables par les céréaliers. L’étude indique aussi que cette tendance pourrait se renforcer. Les éleveurs pourraient devenir de simples apporteurs de matières, ce qui limiterait leur possibilité d’en tirer un revenu satisfaisant. Par ailleurs, les conflits d’usage de certains biodéchets peuvent conduire à une hausse des prix. Dans ce scénario, une fois encore les céréaliers, à travers le recours aux Cive, peuvent plus facilement contourner ce problème.
Cette étude précise aussi que les subventions publiques restent indispensables à beaucoup de projets. Elle suggère qu’il serait important de soutenir les unités de cogénération portées par des petits collectifs d’éleveurs, en encourageant l’innovation technologique visant à réduire ses coûts par rapport à l’injection. Une condition nécessaire pour espérer accroître leurs revenus.