La résistance aux pyréthrinoïdes inquiète les cultivateurs de colza

Des tout premiers cas de mutation SKDR ont été détectés dans la Vienne, l’Eure ou encore l’Ain, mais elle est généralisée dans le quart Nord-Est de la France. Crédit: happyculteur/Adobe Stock

La baisse d’efficacité des insecticides de type pyréthrinoïdes devient préoccupante. En cause, une résistance accrue chez les ravageurs comme le charançon du bourgeon terminal et la grosse altise. Différents niveaux de mutations ont été relevés chez ces insectes.

Afin d’évaluer la situation et de choisir les traitements efficaces, FranceAgriMer a lancé le projet Resist, sous la supervision de Terres Inovia.

Des mutations génétiques observées sur l’ensemble du pays

Chez la grosse altise, les prélèvements réalisés ces dernières saisons mettent en évidence plusieurs niveaux de résistance. Ils sont la conséquence de deux mutations génétiques (KDR et SKDR) ayant permis à ce ravageur de s’adapter aux traitements à base de pyréthrinoïdes.

La première mutation, dénommée "KDR" pour Knock Down Resistance, se retrouve fréquemment dans les populations d’altise adultes. Elle permet à l’insecte de supporter les pyréthrinoïdes; mais le produit a encore en partie le dessus… Le centre du pays et le quart nord-est sont très affectés.

Mais les résultats des analyses menées sur l’ensemble du territoire montrent qu’une majorité de régions sont concernées. Des départements éloignés du quart nord-est sont désormais touchés.

C’est le cas pour les Côtes-d’Armor, la Vendée, ou dans le Sud-Ouest, le Gers, la Haute-Garonne et l’Aude. La mutation gagne aussi le quart sud-est avec l’Isère, la Drôme et l’Ardèche. La Côte d’Azur, très peu concernée par la culture du colza, échappe pour l’instant au phénomène.

La mutation SKDR gagne du terrain

En revanche, la seconde mutation génétique des grosses altises pose un réel problème. Il s’agit d’un niveau de résistance supérieur. Les traitements aux pyréthrinoïdes sont alors inefficaces !
Cette évolution, baptisée "SKDR" pour Super Knock Down Resistance, d’abord repérée dans l’Yonne, s’est étendue aux départements voisins, l’Aube, la Haute-Marne, la Côte-d’Or, la Nièvre, le Jura, la Haute-Saône et la Marne. La mutation SKDR est généralisée dans ces territoires.

On la retrouve dans 41 départements de France métropolitaine, avec de tout premiers cas détectés dans la Vienne, l’Eure ou encore l’Ain.

Efficacité moyenne contre le charançon du bourgeon terminal (CBT)

Contrairement à la grosse altise, le charançon ravageur du colza n’a pas développé de mutation de type SKDR. L’insecte a cependant généré des modifications génétiques du type "KDR", ainsi qu’un autre moyen de résistance : la détoxification.

Ces charançons se concentrent, là aussi, dans le centre et le quart nord-est de la France. Mais le Sud-Ouest est affecté à son tour depuis plusieurs saisons. C’est le cas pour 5 départements, à savoir le Lot-et-Garonne, le Gers, la Haute-Garonne, le Tarn et l’Aude. Au total, 31 départements sont concernés, selon les informations connues à ce jour.

Concernant cette population de CBT, les analyses concluent à un niveau d’efficacité des pyréthrinoïdes autour de 40 à 50%.

Comment s’adapter ?

Quel que soit le cas rencontré, il convient de limiter les traitements à base d’insecticide. Et surtout, de respecter les seuils d’interventions. Les exploitants doivent évaluer le niveau de menace dans leurs champs. Des observations simples peuvent suffire. Terres Inovia donne la marche à suivre et les outils disponibles gratuitement pour cela.

Développer le biocontrôle est une des clés. Dans ce sens, l'institut technique propose des formations aux producteurs de colza pour appliquer les stratégies alternatives, avec notamment les bonnes pratiques pour favoriser la régulation par les auxiliaires de culture.