Maïs : les variétés précoces s'imposent par nécessité

Les retours concernant les moissons des céréales à paille d’hiver sont venus confirmer les craintes printanières de tout un secteur avec des récoltes faibles en blés et orges. Au printemps, le maïs est apparu comme une alternative pour les surfaces non encore emblavées. Mais là encore, les semis tardifs ont souvent été la règle. Quelles conséquences pour cette campagne 2024 ?

champ de maïs aux feuillage vert

Pour autant, les situations très hétérogènes selon les parcelles laissent imaginer des moissons qui s’étaleraient tout au long du neuvième mois, voire pendant la première quinzaine d’octobre, chez les exploitants les moins chanceux. Il faut donc prendre en compte le risque de voir les conditions se dégrader à nouveau, et l’humidité sera à surveiller de très près.

© coco/Adobe Stock

De cette saison très arrosée découlent aujourd’hui plusieurs conséquences. Nous avons échangé avec Anne-Sophie Colart, ingénieure Arvalis, spécialisée dans cette culture. Rendements, variétés, humidité des grains... ces sujets inquiètent les professionnels.

D'abord parce que les conditions météo ne se sont guère améliorées : l’été est moins chaud et plus humide que les deux dernières saisons. « En revanche, les températures sont vraiment remontées à partir de mi-juillet, et c’est surtout ce qui manquait pour le développement des maïs », précise Anne-Sophie Colart. Car après des semis très tardifs, un été installé plus précocement aurait permis de rattraper le retard initial.

« En fourrages, on a l’habitude de semer plus tard, donc c’est plus facile de gérer la culture, mais cette année, on a eu des semis jusqu’à mi-juin », constate l’ingénieure. De fait, la marge de manœuvre est alors réduite. Cette situation a lancé une course contre la montre pour beaucoup d’agriculteurs.

Choix des semences : les exploitants s'adaptent

Ces conditions météo très arrosées ont contraint les professionnels implantés dans les régions les plus touchées à opter plus fréquemment pour des variétés très précoces, voire ultra précoces, de type G1 ou G0. Dans ces parcelles, où les semis n’ont pas pu se faire avant juin, l’institut recommandait par exemple des semences avec des variétés telles que l’Editio ou l’Astucio de KWS. Dans des cas extrêmes, toujours chez le semencier allemand, les grains de type Gustavius ou ES Perspective, de série G0, étaient par exemple un choix judicieux pour compenser cette campagne perturbée.

Même dans le Grand Sud et les bassins de production où il fait habituellement plus chaud et sec, les cultivateurs ont eu tendance à modifier leur choix de grains. D’après les relevés de vente de plusieurs semenciers, des variétés de type G2 ont souvent été préférées par des exploitants qui choisissaient habituellement des séries 3 ou 4.

Pas d’alerte concernant les rendements

Pour Arvalis, le potentiel de rendement restait, mi-août, difficile à estimer. « Le seul avantage est qu’il n’y a pas eu de stress hydrique au moment critique autour de la période de floraison », ironisait Anne-Sophie Colart. Précisant tout de même que cela pourrait survenir dans les zones où la floraison serait la plus tardive, car les températures ont été plus élevées en août, malgré quelques épisodes pluvieux.

« Pour les semis réalisés plus tôt, d’avril jusqu’à mi-mai en moyenne, nous n'avons pas de grosses inquiétudes pour le rendement, car le potentiel ne semble pas vraiment entamé », confiait la scientifique. Les conditions, globalement plus sèches à mesure qu’avance l’été, devraient permettre d’éviter des pertes de rendement significatives. La situation ne sera donc pas comparable avec les résultats des moissons de céréales à paille d’hiver.

Des moissons d’automne pour 2024…

Sans surprise, le développement actuel des maïs dans la moitié nord du pays laisse présager des moissons très tardives. Mais les variétés implantées auront permis de limiter les dégâts. « On estime aujourd’hui qu’elles devraient démarrer autour du 10 au 15 septembre », explique l’ingénieure.

Pour autant, les situations très hétérogènes selon les parcelles laissent imaginer des moissons qui s’étaleraient tout au long du neuvième mois, voire pendant la première quinzaine d’octobre, chez les exploitants les moins chanceux. Il faut donc prendre en compte le risque de voir les conditions se dégrader à nouveau, et l’humidité sera à surveiller de très près.

Cependant, parmi les rares points positifs de cette campagne, on note dans l’ensemble une pression plus modérée concernant les ravageurs. La pyrale et les corvidés notamment ont causé moins de dégâts.

Éviter un séchage long et coûteux

« On s’attend à des récoltes plus humides en moyenne, et cela entraînera forcément des frais », poursuit Anne-Sophie Colart. Une situation que les professionnels du secteur essaient d’éviter. L’institut technique met en avant la tendance à « précocifier » les indices pour chercher à récolter moins humide.

« Auparavant le modèle était à 32 % d’humidité du grain, puis à 25 %. Et aujourd’hui, 22 % si possible », conclut la scientifique. Dans certaines régions très ensoleillées et plus sèches, dans le Sud, on arrive parfois à récolter à un taux de 15 %. Cela permet de gagner un temps précieux sur le séchage.

Au final, paradoxalement, les surfaces en maïs grain ont augmenté de 10 % en France cette saison. La culture a bénéficié des reports sur des parcelles où les conditions météo ont empêché les semis de céréales à paille par exemple. Dans ces exploitations, le maïs, avec son implantation plus tardive a représenté une solution de remplacement naturelle, tout comme le tournesol dans les régions plus adaptées à sa culture.