Vincent Chaplot, directeur de recherche à l’IRD, s’est intéressé aux études scientifiques en question. Dans cet article, il propose ses conclusions et son point de vue.
« L’étude de Lima-Silva et Pelosi, publiée en 2023 dans le journal Integrated Environmental Assessment and Management, est à ma connaissance la plus récente sur le glyphosate, note Vincent Chaplot, directeur de recherche à l’IRD. Elle reprend les conclusions des 63 études du monde entier publiées entre 1982 et 2022. »
Ses auteurs concluent à une absence d’impact du glyphosate lorsqu’il est utilisé aux doses recommandées.
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« Ils précisent toutefois que plusieurs applications par année peuvent induire des effets négatifs sur la reproduction et la structure des populations de vers de terre, ce que les expérimentations disponibles, selon Vincent Chaplot, ne peuvent toutefois mettre en évidence par manque d’études sur le long terme. »
Les doses de glyphosate testées bien au-delà des normes
« La "ré-analyse" des données de base des 63 études "glyphosate" m’a donné à voir que seulement 32 d’entre elles présentent des données expérimentales sur les vers de terre et ont fait l’objet d’une publication dans une revue internationale faisant appel à des experts pour valider les résultats. »
« Nous observons d’abord que la très grande majorité de ces études a été réalisée en laboratoire, loin des conditions réelles que connaissent les agriculteurs », poursuit-il.
De plus, la dose moyenne de glyphosate appliquée dans ces études (recalculée par le chercheur de l’IRD et convertie pour la couche 0-30 cm) avoisinerait l’équivalent de 2.500 l/ha, « avec au maximum l’équivalent de 15.000 litres, soit 5.000 fois la dose maximale autorisée, dans l’étude de García-Pérez (2020) au Mexique utilisant 2 380 mg de glyphosate par kg de sol et publiée dans le journal Applied Soil Ecology) ».
Seulement 8 des 32 études appliquent moins de 10 l/ha de glyphosate.
Si les doses calculées par Vincent Chaplot semblent astronomiques pour la rédaction de Cultivar, ses conclusions restent intéressantes : « Aucune surmortalité liée au glyphosate n’a été observée sur les populations de vers de terre ! »
L’ACS voit les populations de vers de terre augmenter malgré le recours au glyphosate
Les agriculteurs en ACS qui utilisent classiquement du glyphosate pour la destruction des couverts végétaux voient les populations de vers de terre de leurs champs augmenter.
« Cette évolution peut être liée à la fois à la diminution du travail du sol et aux stratégies intégrées de protection des cultures, deux facteurs évalués par l’étude de Briones et Schmidt (2017) publiée dans Global Change Biology à partir de 165 publications mondiales. »
« Les chercheurs montrent que moins perturber le sol augmente l’abondance des vers de terre de 137 % en moyenne pour le semis direct et de 127 % pour un travail du sol superficiel par rapport au travail profond ; alors que l'utilisation de glyphosate ne semble pas avoir d'effet significatif », conclut Vincent Chaplot.