"Depuis 50 ans, la part du couple alimentation/logement compte pour 50 % du budget des ménages, note Carine Barbier, chercheuse au CNRS et l’une des auteurs de l’étude Prospective du système alimentaire et de son empreinte énergétique et carbone. Mais l’alimentation voit sa part diminuer continuellement."
Une évolution qui ne pourra pas durer éternellement, au regard des objectifs de neutralité carbone fixés par le gouvernement français. Parmi les quatre scénarios échafaudés dans le cadre de l’étude, le scénario "génération frugale" est le seul à permettre une neutralité carbone avec la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’une part et la séquestration biologique du carbone d’autre part. Avec deux des autres scénarios ("technologie verte" et "réparation"), la séquestration biologique ne suffit pas. "Ces scénarios ont recours à la séquestration géologique pour parvenir à la neutralité, précise la chercheuse au CNRS. Ce qui signifie que le carbone est capté de manière mécanique et active par l’homme pour être enfoui en profondeur. Or, il n’existe à ce jour aucun résultat probant montrant l’efficacité de ces techniques à grande échelle. Elles n’en sont qu’au stade pilote." Autant dire que la frugalité est sans doute l’une des seules solutions permettant d’atteindre les objectifs de neutralité carbone.
Des produits plus chers, pas forcément le panier de la ménagère
Le scénario "génération frugale" se base essentiellement sur "une contraction des importations et des exportations, explique Carine Barbier. Les deux évoluant dans le même sens, la balance commerciale de la France reste positive. L’objectif est de favoriser la consommation intérieure en se réappropriant les industries de transformation sur le territoire français. Avec un avantage collatéral: améliorer la souveraineté alimentaire de l’Hexagone".
La chercheuse ne le cache pas, ce scénario pourrait induire une augmentation du prix des produits alimentaires. Mais "avec une réduction de la consommation de viande et une plus grande consommation de fruits et de légumes de saison, moins transformés, le prix de l’assiette ne devrait toutefois pas bondir! Mais il convient de réinvestir dans l’alimentation".
Cette évolution induirait en parallèle un besoin en eau pour l’agriculture moins important. En effet, l’étude met en avant à la fois une diminution des surfaces irriguées et de moindres besoins par unité de surface dans le scénario "génération frugale". Sans changement massif de l’usage des sols, cette évolution favorable alors que le changement climatique guette peut en partie s’expliquer par des productions végétales qui vont plus directement à l’alimentation humaine et moins à l’alimentation animale. Mais avant de voir ce scénario se réaliser, il faut une forte volonté politique!