Le bilan mondial 2023 du marché volontaire du carbone, publié par Ecosystem Marketplace, est en demi-teinte. Pour rappel, l'organisation à but non lucratif basée à Washington DC se concentre sur l'augmentation de la transparence et la fourniture d'informations pour les services écosystémiques et les systèmes de paiement.
De fait, si 2023 a été l'année la plus chaude jamais enregistrée sur la planète, signe évident du réchauffement climatique et de la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre, certaines initiatives ont été mises en doute.
Selon une étude parue dans le magazine américain Science, dont le quotidien Le Monde s'est fait l'écho en août 2023, des projets censés limiter ces émissions surestimeraient très fréquemment leur bénéfice réel sur l'environnement, d'après les auteurs de l'étude. De quoi créer la polémique, et rebuter les entrées potentielles sur ce marché.
La France bénéficie d'un système fiable
Mais, assure Pierre Rayé, qui dirige France Carbon Agri, « la controverse n'a pas lieu d'être en France, du fait du sérieux et de la crédibilité des outils, dont le label bas carbone mis en place pour vérifier et certifier l'impact de ces projets ».
Plus de 2 Mds$ en 2021
Toujours est-il que, dans d'autres pays, le débat a clairement pesé l'an dernier. Pour preuve, le volume des transactions au niveau mondial a reculé de 56 % par rapport à 2022. Certes, la valeur annuelle totale, de 723 millions de dollars (M$), est plus élevée que celle enregistrée chaque année entre 2009 et 2020.
Mais il n'empêche, on est loin du record atteint en 2021, avec plus de 2 milliards de dollars (Mds$). En fait, ce qui a partiellement sauvé la valeur du marché l'an dernier, c'est l'augmentation du prix de ces crédits carbone. Là aussi, il est en fait en baisse, puisque la moyenne a reculé à 6,53 dollars par tonne d'équivalent CO2 (- 11 % par rapport à 2022). Il est toutefois 60 % plus élevé qu'en 2021.
Un marché français en pleine structuration
En France, le marché n'en est encore qu'à ses débuts, et selon les estimations de Pierre Rayé, France Carbon Agri comptabilise aujourd'hui quelque 3.000 acteurs engagés dans cette initiative lancée en 2019 en vue d'accélérer la transition bas carbone des exploitations, tandis qu'un millier d'autres participent à d'autres initiatives. Ils ne représentent qu'à peine 1 % du total des exploitants agricoles...
Les entreprises doivent aussi s'intéresser aux territoires
Enfin, autre enseignement du rapport d'Ecosystem Marketplace : non seulement les répondants-financeurs, en particulier dans les pays industrialisés, recherchent des projets plus proches de chez eux, mais aussi, au-delà du simple évitement des émissions, ils cherchent des initiatives ayant un impact social et environnemental plus large.
C'est d'ailleurs l'un des enjeux, en France, de la structuration du marché volontaire du carbone. « Aujourd'hui, 98 % des financements de projets par les grandes entreprises s'effectuent à l'international, précise d'ailleurs Pierre Rayé. Nous voulons que ces entreprises s'intéressent aussi aux territoires, dans l'Hexagone. »