
Yannick Robiglio fait partie des 20 premiers vignerons français a avoir investi dans un robot Bakus. Il tourne dans son vignoble au pied de la Sainte-Victoire en Provence.
© Séverine Favre>>> Pourquoi vous êtes-vous équipés d’un robot ?
Yannick Robiglio : Je cultive 50 hectares de vigne à Trets dans les Bouches-du-Rhône. En 2020, j’ai acheté un tracteur neuf. Uniquement avec les interceps, j’avais fait plus de 550 heures sur l’année. Sans tractoriste, je ne pouvais pas continuer seul ainsi. À peine le travail fini d’un côté qu’il fallait recommencer d’un autre. J’avais dans l’idée que le robot Bakus me donnerait le temps de tout bien faire.
En 2020, rares étaient les vignerons particuliers à avoir sauté le pas. Je l’ai fait et j’entame ma quatrième campagne de travail du sol avec un Bakus L de Vitibot.
Benoit Cadart : Le château de Quincay est un domaine familial de 29 ha en conversion bio. Pour réaliser tout le travail du sol, nous avions besoin d’enrichir notre parc tracteurs d’un nouvel enjambeur. On a étudié deux possibilités : un robot ou un enjambeur thermique ? En faisant le « pour » et le « contre » de chaque solution, le robot l’a emporté. Il était moins cher à l’achat qu’un tracteur enjambeur neuf. Le délai de livraison après commande était plus court et l’autonomie répondait partiellement au départ en retraite de mes parents.
>>> Comment utilisez-vous le robot Bakus ?
Yannick Robiglio : Bakus est équipé de lames plates interceps électriques développées par Vitibot. Sur les vignes du domaine en 2,5 mètres, dans les meilleures conditions, il peut travailler jusqu’à 5 hectares par jour.
Le robot débute sa mission dès février pendant que je taille à proximité. Selon les années, il passe jusqu’à 5 fois dans les parcelles. Je complète les travaux de désherbage mécanique par un ou deux passages de doigts Kress réalisés avec un tracteur thermique.
Benoit Cadart : Depuis juillet 2022, l’engin tourne sur 25 hectares dans un parcellaire groupé, divisé en îlots de 2 hectares avec un écartement d'1,55 mètre sur des sols très variés, allant du sableux à l’argile à silex, plat ou en pente. Le robot est équipé en saison des lames plates électriques du constructeur. Selon les conditions météo et le salissement, le débit de chantier est très variable : deux à trois hectares par jour en début de saison, jusqu’à 5 ha par la suite. Des passages complémentaires de disques émotteurs montés sur un enjambeur thermique permettent de gérer les adventices.
>>> Que faites-vous quand le robot travaille en autonomie dans les vignes ?
Yannick Robiglio : L’hiver, je taille. Au printemps ou en été, je suis occupé dans les vignes à proximité.
Benoit Cadart : Ça dépend. Parfois, je délocalise mon bureau dans les vignes ! J’utilise la connexion Internet de mon téléphone et, avec mon ordinateur portable, je fais des tâches administratives pendant deux à trois heures de rang.
>>> Gagnez-vous du temps ?
Benoit Cadart : Le fait d’avoir un robot n’offre pas plus de fenêtres de travail qu’avec un enjambeur. Mais quand les conditions sont réunies, on peut faire deux tâches à la fois. Le robot va par exemple passer les lames pendant que je passe les disques.
Yannick Robiglio : Quand le robot fonctionne et que les conditions météo s'y prêtent, je ne cours plus derrière les adventices.
>>> Avez-vous déjà eu des pannes ?
Yannick Robiglio : Cette année oui, sur les interceps électriques de la marque. Les moteurs surchauffent. Après trois heures de fonctionnement maximum, le robot se met en sécurité. Il faut laisser les outils reposer puis venir relancer le robot pour 30 minutes, une heure de travail. Avec cette avarie, le robot perd beaucoup en autonomie.
D’après les techniciens de Vitibot, le problème ne peut pas être réparé. Il faut changer les interceps qui ne sont plus sous garantie. La facture monte à 32.000 euros. La direction propose de prendre en charge la moitié de la somme. L’offre ne me convient pas. J’espère que nous trouverons rapidement un accord commercial et que mon robot pourra reprendre du service au plus vite.
Benoit Cadart : Le problème avec les nouvelles technologies c’est que l’on ne peut rien faire en cas de panne. J’ai eu moi aussi des soucis de surchauffe avec les interceps. Un a déjà été changé. Ma garantie de deux ans expire dans deux mois. J’espère ne pas avoir de problème majeur par la suite.
Même en l’absence de motorisation thermique et d’hydraulique, il y a des frais. J’ai dû changer à plusieurs reprises des fusibles par exemple.
>>> Combien vous a coûté le robot ?
Benoit Cadart : 115.000 euros, aide déduite de 65.000 euros. Sont compris pour ce montant : le robot, les interceps électriques, l’arpentage des parcelles, le chargeur et les batteries.
Il faut ensuite rajouter un abonnement de 5.000 euros HT par an pour le guidage GPS et le SAV.
Yannick Robiglio : En 2021, il n’y avait pas d’aide à l’investissement. J’ai déboursé autour de 200.000 euros pour le robot, les interceps électriques, une charrue, la remorque…
>>> Êtes-vous intéressés par d’autres équipements, pulvérisation ou rognage par exemple, qui donneraient de la polyvalence à votre robot ?
Benoit Cadart : Je trouve le robot bien adapté pour le travail du sol, une opération très chronophage. Pour l’instant, j’utilise les lames électriques sur le robot mais j’ai aussi une décavaillonneuse mécanique DK compact de Boisselet compatible. J’envisage de l’utiliser sur 10 à 15 % de mes surfaces chaque année.
Yannick Robiglio : Sur mon domaine, je ne trouve pas que le robot soit un engin pertinent pour m’aider dans la pulvérisation ou le rognage. En revanche, je serais adepte d’une épampreuse capable d’éviter les complants.
>>> Yannick, après quatre campagnes d’utilisation, avez-vous vu des évolutions technologiques sur le robot ?
Yannick Robiglio : La carte mère de mon robot a été changé trois fois pour suivre les mises à jour. Les plus spectaculaires sont celles relatives au demi-tour dans les tournières. Au début, le robot faisait ce mouvement à 0,5 km/h. Désormais, il tourne à 2-3 km/h.
>>> Comment résumeriez-vous votre expérience ?
Yannick Robiglio : C’est une bonne machine avec beaucoup de qualités. J’attends néanmoins une meilleure gestion des vieilles versions.
Benoit Cadart : Le désherbage est bien fait et l’intercep est très respectueux des pieds de vigne. Quand ça fonctionne, c’est génial ! Avec l’arrêt du désherbage chimique et la retraite de mes parents, je crois avoir fait le bon choix en m’équipant d’un robot.
Séverine Favre
170 Bakus en France
La robotique fait son chemin en viticulture et le constructeur Vitibot, filiale du groupe Same Deutz-Fahr, en est un acteur fort. Depuis le lancement de Bakus en 2020, 170 modèles ont été mis en service en France.
À partir d'avril 2024, tous les robots viticoles de Vitibot bénéficieront d’une garantie étendue de 5 ans ou 3.000 heures.
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