De nouveaux acquis sur la pépinière et sur l’esca

L’équipe du projet Origine a pu mettre en évidence le fort impact des conditions de conservation des bois sur le taux de reprise au greffage. Photo : Adobe Stock/belinot

Les premiers projets du plan dépérissement arrivent à terme et apportent leur lot de nouveaux enseignements. Focus sur la pépinière et sur les investigations autour des symptômes de l’esca.

Quel est le lien entre l’extériorisation des symptômes d’esca et la sécheresse ? Si le mystère n’est pas encore totalement élucidé, l’Inrae de Bordeaux progresse sur la question ces dernières années, notamment avec les travaux du projet Physiopath. En passant aux rayons X des ceps entiers atteints d’esca, l’UMR Save a mis en évidence que l’apparition des symptômes est liée à la présence de thylles1 ou de gel dans les vaisseaux. Ce ne sont pas les champignons pathogènes ou les bulles d’air qui créent les panachures dans les feuilles, mais bien une réaction de la plante elle-même. L’origine précise de cette réaction est en cours d’étude dans le projet Escapade.

Mais d’ores et déjà, les analyses montrent qu’en moyenne 77 % des vaisseaux des feuilles symptomatiques, et 30 % dans les tiges, ne fonctionnent pas. Ces chiffres pourraient expliquer qu’en cas de sécheresse, la mortalité des ceps malades puisse augmenter, puisqu’ils ont déjà un fort pourcentage de vaisseaux « bouchés ».

Pas en dessous de 35 % d’humidité

Les chercheurs ont également étudié l’appareil vasculaire de la vigne et son comportement face aux maladies du bois. Deux essais réalisés en serre sur des plants inoculés avec des spores d’un champignon lié à l’esca ont montré que les tiges possédant des vaisseaux de faible diamètre sont plus résistantes à la maladie. À l’inverse, les ceps avec une forte densité de gros vaisseaux sont plus sensibles.

Un autre projet, Origine, s’est focalisé sur la pépinière viticole. Son objectif ? Améliorer la qualité des plants et les taux de reprise au greffage. L’une des expérimentations, conduite par l’IFV, a comparé différentes conditions de conservation des bois entre le prélèvement des greffons et le greffage : en sac micro-perforé, en sac de jute ou en vrac, en frigo ou en extérieur. La teneur en eau des bois a été suivie tout au long des quatre mois de conservation. Les résultats sont sans appel : dès que la teneur en eau des bois diminue en dessous de 35 %, les taux de reprise au greffage sont proches de zéro. Il convient donc d’éviter le stockage en extérieur, même de courte durée, et de préférer l’usage de sacs micro-perforés pour une conservation optimale des bois.

Par ailleurs, des tests ont été conduits pour définir des marqueurs précoces de taux de reprise. Lors du greffage, en effet, un cal va être produit pour établir un lien entre le greffon et le porte-greffe. Cette première étape indispensable s’accompagne de la production de nombreuses molécules. L’Inrae de Bordeaux a cherché à savoir si certaines d’entre elles pouvaient permettre de prédire la réussite de l’assemblage. Un doctorant a effectué des prélèvements sur des plants un mois après greffage. Différents assemblages étaient testés : trois cépages (merlot, négrette et ugni blanc) et trois porte-greffe (SO4, RSB1 et 140 RU). 72 composés ont été analysés.

Irrigation dans les plantiers

Une assez bonne corrélation a été établie entre le taux de reprise en pépinière et les teneurs des greffons en resvératrol et en trans-Piceatannol, deux antioxydants qui s’accumulent dans les plantes en situation de stress. « Ces résultats préliminaires doivent être consolidés, prévient Nathalie Ollat, directrice de l’UMR EGFV (écophysiologie et génomique fonctionnelle de la vigne), mais ils sont encourageants. »

Une parcelle expérimentale a aussi été mise en place à Bordeaux, afin d’étudier l’effet de l’irrigation et de la fertilisation sur le développement des jeunes plants, eux-mêmes munis de racines courtes (1-2 cm) ou longues (10-15 cm). Des mesures ont été effectuées tous les six mois pendant deux ans. Leur analyse indique qu’en situation irriguée, les plants à racines longues sont favorisés, produisant plus de matière sèche. En revanche, en situation sèche, l’effet du stress hydrique est plus prononcé sur les plants à racines longues.

(1) Thylles : excroissances cellulaires dans les vaisseaux de la plante.

Cépages et porte-greffe
Une large gamme de tolérance à la sécheresse
Grâce à la mesure des phénomènes de cavitation dans les vaisseaux de la vigne, l’Inrae de Bordeaux a pu dresser une échelle de tolérance à la sécheresse incluant 23 cépages, quatre variétés résistantes et trois porte-greffe.
Ces résultats montrent que les porte-greffe sont généralement plus tolérants que les cépages. Fait rassurant, les conditions nécessaires pour atteindre le seuil de mortalité – qui correspond à la moitié des vaisseaux embolisés – ne se rencontrent que rarement sous nos climats. La valeur la plus extrême enregistrée à Bordeaux atteint -2 MPa, « ce qui laisse une marge de sécurité », indique Chloé Delmas, chargée de recherche et responsable du projet Physiopath à l’Inrae Bordeaux. Des mesures à différents stades d’aoûtement montrent que les tiges font preuve d’une meilleure capacité à tolérer la contrainte hydrique avec l’avancement de la saison. En revanche, aucun lien n’a pu être établi entre le diamètre des vaisseaux et la tolérance à la sécheresse.

Article paru dans Viti 458 de février 2021

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