Pour la gestion des rangs et interrangs sans herbicide ni trop de travail du sol, la paille montre de l’intérêt. Des expérimentations ont été menées sur les filières de la pépinière ornementale, pépinière viticole et en vignobles. Outre la gestion des adventices, le paillage à la paille de blé non broyée, favorise la vie du sol et sa fertilité, a rappelé Marie Bonnisseau de l’IFV, lors du colloque Euroviti au dernier Sival 2024.
15 t/ha de paillage
Dans les essais menés par l’IFV et l’Astredhor, environ 15 t/ha de paillage ont été apportées sur rangs et interrangs, sur plusieurs cultures et secteurs pédoclimatiques : une jeune vigne plantée en sol limono-argileux sur le saumurois en 2019, une vigne en place sur la Côte de Brouilly sur arène granitique, une pépinière d’arbres d’ornement et de fruitiers plantés en 2019 sur limon-sablo-argileux dans la Manche, une pépinière de vigne en sol sableux de Maine-et-Loire et enfin, également en sol sableux en pépinière ornementale type laurier-cerise, érable sycomore, et fruitier pommier greffé.
Meilleure reprise des plants
Le paillage juste après la plantation de jeunes plants, permet une meilleure reprise, une diminution de la mortalité et une augmentation de la vitesse de croissance des plantes. Cela a notamment été observé sur des pommiers greffés non irrigués, plantés en 2023, suivis selon deux modalités : paillage et binage + fertilisation à 60 unités d’azote par an. À la reprise, la parcelle paillée a subi 12 % de mortalité contre 20 % pour la modalité binée.
La croissance de la greffe mesurée fin août était de 18 cm pour la modalité binée et fertilisée, contre 27,5 cm en moyenne pour la modalité paillée, pourtant non fertilisée, liste Camille Soulard et de l’Astredhor Seine Manche. Ce gain de croissance est très souvent observé surtout sur les sols drainants ou pauvres.
Sur plantation de vignes, les racines étudiées par déracinements au bout de 3,5 ans de plantation montrent l’apparition de racines le long du porte-greffe dans l’horizon plus superficiel pour la modalité paillée, avec une augmentation du nombre et des diamètres des racines (+ 25 % en moyenne).
Réduire les écarts de température et d’humidité
Autre gros avantage mis en avant par l’IFV et l’Astredhor lors de leurs suivis : le paillage permet de diminuer l’amplitude de variation des températures et un maintien de l’humidité du sol même en horizon superficiel.
« Lors d’un essai vignes à l’IFV de Montreuil-Bellay (49) en 2020, la modalité paillée n’a atteint sur les 35 premiers centimètres que 118 jours en sécheresse, c’est-à-dire avec un niveau d’humidité inférieur à 30 %, contre 319 jours pour la modalité binée, indique Marie Bonnisseau. Et cette sécheresse n’a pas touché les horizons profonds avec le paillage, contrairement au témoin biné. Au final, grâce au paillage, il y avait 63 % de jours en moins où la vigne était en difficulté pour trouver de l’eau. »
Gain de fertilisation
Sur l’aspect fertilisation, l’apport annuel de paillage (15 t/ha) permet un bon apport de matière organique et la comparaison avec une modalité enherbement un interrang sur deux montre un écart de + 0,2 % de MO au bout de quatre ans. Des essais réalisés à Angers en pépinière ont montré qu’un paillage équivaut à au moins 60 unités d’azote, et 120 UN avec deux paillages par an, ce qui permettrait de supprimer la fertilisation dans la majorité des cas.
« Les origines de cette meilleure fertilité passe par une meilleure rétention en eau du sol, une meilleure vie du sol qui dégrade davantage la matière organique et par un changement de cortège microbien sûrement plus favorable au cycle de l’azote », liste Alain Ferre, directeur recherche et innovation d’Astredhor Loire-Bretagne.
Règles à suivre
Attention tout de même à suivre quelques règles pour bénéficier des intérêts d’un paillage :
- Pailler sur un sol préparé avec un grattage pour éliminer les adventices de surface.
- Réaliser un paillage en surface et jamais l’enfouir pour éviter les problèmes de faim d’azote. Aucune faim d’azote n’a d’ailleurs été observée par l’IFV et l’Astredhor lors de l’étude, contrairement à l’emploi du BRF enfoui.
- Trouver un approvisionnement avec un coût raisonnable, sachant que la disponibilité est de plus en plus compliquée. Le bilan entretien du sol d’un paillage est d’environ +1000 euros/ha chiffrent l’IFV et l’Astredhor. Les données en pépinière montrent que ce surcoût est compensé par la réduction de fertilisants et l’augmentation des rendements.
- Choisir un système d’apport mécanisé (type petit épandeur et non pailleuse-désileuse), pour ne pas épandre la paille manuellement. Des granulés de paille devraient être testés en 2024, pour simplifier l’apport.
Quelques limites sont aussi observées. D’après les retours de l’Astredhor et de l’IFV, l’impact contre les adventices se vérifie, hormis sur liserons et chardons, que le paillage n’arrive pas à maîtriser. Enfin, concernant la qualité sur les produits finis, Marie Bonnisseau rassure en évoquant « des vins qui n’ont pas le goût de paille » comme vérifié par un panel de dégustateurs !
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