Les couverts végétaux d’interculture stockent-ils du carbone dans les sols ?

Depuis 2015, les chercheurs Christopher Poeplau et Axel Don ont compilés les données de 30 sites expérimentaux à travers le monde. L'objectif était double : vérifier l'utilité des couverts végétaux en interculture dans le stockage du carbone dans le sol et observer les méthodologies des différentes études pour en approuver ou non la fiabilité.

Les couverts végétaux d'interculture stockent-ils du carbone dans les sols ?

© Serjik Ahkhundov

Semer sans travailler le sol et implanter des couverts végétaux constituent deux des principaux piliers de l’agroécologie. Ils sont souvent présentés comme favorisant l’augmentation du stock de carbone dans les sols.

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Dans un précédent article, Vincent Chaplot, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement, a mis en avant des faits scientifiques indiquant que la réduction et l’abandon du travail du sol induisent un stockage de carbone en trompe l’œil.

Aujourd’hui, il souhaite partager son analyse de la littérature scientifique sur les couverts végétaux d’interculture.

Les couverts végétaux piliers de l’agroécologie

Une des pistes invoquées pour augmenter les stocks de carbone du sol et l’améliorer de façon durable ets la suivante : couvrir le sol toute l’année grâce à des couverts végétaux semés après la récolte pour accroître la photosynthèse et donc l'allocation de carbone au sol.

Les chercheurs Poeplau et Don, qui ont compilés dès 2015 les données de 30 sites expérimentaux dans le monde, ont conclu à une augmentation moyenne des stocks de carbone du sol de 0,35 t/ha/an, ce que reprennent les différentes institutions mondiales, dont l’Inrae en France.

Les couverts ne stockent finalement pas plus de carbone que les sols nus

Dans leur étude de 2023 pour le journal Global Change Biology, Vincent Chaplot et son collègue Pete Smith, professeur de science du sol à l’université d’Aberdeen (Royaume-Uni), précisent que les 37 études de terrain existantes dans le monde n'ont échantillonné que les 30 premiers centimètres du sol, et souvent moins.

  • Treize études ont présenté des informations sur la teneur en carbone uniquement et non sur les stocks de carbone ;
  • quatorze n'avaient pas de traitement de contrôle sans couvert ou avaient des durées de trois ans ou moins (5 études) ;
  • d’autres n'avaient considéré qu'un à deux points de mesure par traitement, ce qui ne permet pas de validation statistique (4), ou ont utilisé des couverts de plus d’un an en lieu et place de couvert végétaux annuels (2), ce qui constitue, dans tous les cas, des faiblesses scientifiques et peut livrer des résultats non concluants.

Sur les 6 essais restants, 4 ont montré des tendances non significatives. Une étude a montré un effet négatif et une autre, un effet positif, résultant en un stockage moyen de carbone par les couverts végétaux de 0,03 t/ha/an, soit 10 fois moins que ce qui était annoncé, et non significatif.

Quelles pistes pour l’avenir ?

Il reste encore beaucoup à faire pour améliorer la conception des études sur les pratiques agricoles permettant de parvenir à des conclusions solides. Le chemin reste aussi à tracer pour comprendre les réelles raisons sous-jacentes de la faible efficacité des couverts végétaux pour séquestrer du carbone dans les sols.

Dès lors, que proposer pour augmenter les stocks de carbone des sols ? Il faut sans doute creuser les aspects de balance de nutriment dans le sol, duquel nous exportons des quantités importantes de nutriments à travers les produits agricoles.

Comment, dès lors, en l’absence de nutriments, peut-on espérer que le carbone entrant dans le sol par les plantes puisse être stabilisé grâce à la vie du sol sous forme de MO (un ensemble de molécules constituées de C, N, P, K, S,…) ?