« Pour partager la valeur, il faut la connaître ! » remarquait Pascal Lecamp, député (MoDem) de la Vienne, lors des premières Rencontres de l'agrivoltaïsme, qui ont eu lieu le 29 octobre dernier à Paris, à l'initiative de France Agrivoltaïsme. Or, selon lui, « elle diffère d'une région à l'autre ». De fait, l'intensité du soleil n'est pas la même à Lille et à Marseille...
L'élu, qui anime un groupe de travail transpartisan sur le partage de la valeur et la contractualisation des projets agrivoltaïques (sur ce dernier point, il suggère, avec d'autres législateurs, une dérogation aux règles du bail rural, afin d'inclure l'agrivoltaïsme et de sécuriser l'agriculteur), propose entre autres de s'appuyer sur des experts de l'Ademe et d'Inrae pour mieux calculer ce qu'apporte l'agrivoltaïsme, même indirectement.
Valoriser tous les services rendus
En effet, alors que le décret accepte une baisse de production pouvant atteindre 10 % sous les panneaux et qu'il est en conséquence impossible d'aller plus bas, Pascal Lecamp se demande s'il ne serait pas judicieux d'inclure, pour compenser une perte plus forte, le fait que la production agricole utilise moins d'eau, par exemple. « Ce serait un service rendu à l'environnement. Et après tout, les rendements de l'agriculture bio sont souvent bien inférieurs (de plus de 10 %) aux rendements de l'agriculture conventionnelle », argumente-t-il.
Pas assez de souplesse
Cette tolérance de seulement 10 % de baisse de production sous les panneaux solaires préoccupe également Bruno Vila, président de la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles des Pyrénées-Orientales (FDSEA 66), qui considère qu'il faut davantage de souplesse, « les conditions de culture pouvant largement évoluer d'une année à l'autre », dit-il.
En outre, tous les territoires n'ont pas les mêmes caractéristiques. « Il faudrait donc des recherches locales, d'abord, qui permettraient ensuite d'avoir un consensus au niveau national », ajoute-t-il.
Des coûts de raccordement parfois prohibitifs
Il n'empêche, pour Sébastien Robert, directeur France de Voltalia, un fournisseur de services dans les énergies renouvelables, « le cadre législatif français est le plus mature d'Europe ». Reste que les énergéticiens sont parfois accusés d'un manque de transparence sur leurs recettes... Eva Vandest, directrice des affaires publiques d'Amarenco, un producteur indépendant d'énergie verte (grâce à des solutions solaires photovoltaïques et d'optimisation de consommation), veut, elle, mettre en avant leurs dépenses.
D'abord, l'adaptation d'une centrale classique (panneaux sur un toit de parking, par exemple), aux conditions d'un terrain agricole. Cela exige ainsi de surélever la structure. « Ce qui coûte cher, ne serait-ce qu'en acier pour des supports », dit-elle. Et si une grande structure peut générer des économies d'échelle pour le développeur du projet, les coûts de raccordement de la centrale à un poste source – et ils ne sont pas assez nombreux en France, de l'avis des experts – afin d'alimenter le réseau électrique, « représentent entre 15 et 20 % des dépenses d'investissement pour la centrale, fait-elle remarquer. Au point que, dans certains cas, le coût est si élevé, du fait par exemple de l'éloignement du poste source d'une centrale, que le projet est abandonné ».
Le secret ? Le partage pour tout le territoire
En somme, si l'agrivoltaïsme est « très contraint, du fait de la topographie, du raccordement et des enjeux d'acceptabilité par les riverains, c'est un métier qui crée de la valeur agronomique, et cette valeur doit être prise en compte », résume Bertrand Drouot L'Hermine, directeur de développement chez TSE, l'un des principaux producteurs d'énergie solaire en France.
Au point d'adopter une logique de co-investissement entre énergéticiens, exploitants, propriétaires et même autorités territoriales ? Certains y croient.
En tout cas, tranche Pascal Lecamp, « l'acceptabilité, pour les riverains mais aussi pour les agriculteurs qui ne pourraient pas compléter leurs revenus par de l'agrivoltaïsme, du fait de contraintes trop grandes, dépend de la répartition de la valeur créée par cette activité et de son ruissellement sur tout le territoire ».
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