« On aime les montbéliardes car elles sont adaptées à notre système. Elles sont rustiques et produisent un lait riche en matière protéique, idéal pour nos fabrications », assure Bruno Joly, éleveur de bovins lait dans la Vienne.
Pourtant, ce producteur n’a pas toujours élevé des montbéliardes. Il y a quinze ans, le cheptel du Pré Joly était entièrement constitué de prim’holstein dont le lait était commercialisé auprès de la coopérative Agrial. Mais ce système ne correspondait plus aux attentes de Bruno Joly qui souhaitait avant toute chose développer la vente directe.
Montbéliardes, jersiaises et normandes
C’est en 2011 qu’il franchit le pas. Pour commencer, il s’engage vers l’agriculture biologique afin de valoriser au mieux ses produits auprès des consommateurs. En parallèle, il achète deux lots de montbéliardes, soit 14 mères, mais aussi 8 frisonnes qu’il insémine avec du jersiais. « Nous avons également quinze vaches que nous appelons normandes. En réalité, elles sont issues d’un croisement montbéliarde x prim’holstein inséminé avec de la rouge suédoise. La descendance de ces animaux, elle, est inséminée avec de la normande », détaille Bruno Joly.
>>> À lire aussi : Croisement d'absorption : un éleveur laitier raconte son passage en Montbéliarde
Herbe pâturée, méteil et foin à volonté
Si le producteur s’intéresse à ces trois races, c’est avant tout pour améliorer la valorisation de l’herbe au pâturage. « La montbéliarde, la jersiaise et la normande sont adaptées à la conduite en bio et valorisent bien l’herbe. Elles produisent des laits riches en TP et en TB donc plus faciles à travailler », explique l’éleveur.
Sur les 150 ha de prairies de la ferme, 85 ha sont dédiés au pâturage. Un réseau d’eau alimente chacune des parcelles, toutes pourvues d’abreuvoirs à niveau constant avec flotteur. « Ces travaux d’aménagements se sont étalés sur plusieurs années. Désormais, nos animaux pâturent du 15 février au 15 décembre », assure l’éleveur. En plus du pâturage, les vaches laitières reçoivent 2 à 3 kg de méteil autoproduit, un mélange de triticale, pois et féverole et du foin séché en grange à volonté.
Six ETP de plus qu’en 2011
Le lait produit sur l’exploitation est principalement valorisé en circuit court. « Chaque année, nous transformons à la ferme un peu plus de 300.000 l sur les 460.000 l produits. Notre gamme se compose de plus de 40 références que nous distribuons dans un rayon de 60 km autour de la ferme », assure Bruno Joly.
En effet, le Gaec du Pré Joly commercialise des fromages lactiques, des tommes, des yaourts, des desserts lactés, du lait, du beurre et de la crème.
Assurer la transformation et la distribution de tous ces produits nécessite 6 ETP de plus qu’en 2011. D’ailleurs, le producteur semble considérer les emplois générés comme l’aboutissement de sa démarche : « Sur l’exploitation, les dépenses sont majoritairement liées aux charges sociales et non à l’achat d’intrants. Pour moi, c’est une victoire », se réjouit-il.
Un clientèle de professionnels
Au niveau de la vente, la préparation des commandes est le poste qui mobilise le plus de main-d’œuvre. Mais il n’est pas le seul. La commercialisation est un poste clé, qui prévoit aussi de répondre aux appels d’offres, d'être présent sur les points de vente et d'assurer les livraisons.
Aujourd’hui, la clientèle de la ferme de Pré Joly compte 23 magasins de producteurs, 13 AMAP, des restaurants, des collectivités territoriales et leurs prestataires, le CHU de Poitiers, ainsi que des cuisines centrales privées.
350 euros de budget communication par an
Se construire une clientèle locale est un travail de longue haleine : « Entre 2011 et 2021, nous avons augmenté progressivement nos ventes, explique Bruno Joly. Lors de la période Covid, les ventes ont été boostées. Mais en 2023, nous avons connu une période plus calme. En décembre 2023, les ventes ont progressé de nouveau. On peut dire que depuis 2021, nous suivons les mêmes tendances de consommation que celles observées en magasins. »
Pour se faire connaître, Bruno Joly n’a pas construit de « stratégie de communication ». « Un jour quelqu’un m’a dit qu’il fallait consacrer 10 % de mon chiffre d’affaires à la publicité. Nous sommes loin de ce ratio ! Notre budget publicité s’élève à 350 euros par an, le montant nécessaire à l’impression de flyers pour notre journée portes ouvertes. À cette occasion, nous recevons plus de 1.000 visiteurs », s’exclame-t-il avec enthousiasme.
Un engagement bénévole associatif et politique
Si les canaux traditionnels ne sont pas exploités, c’est avant tout car le producteur s’appuie sur son réseau de connaissances. En effet, investi dans le milieu associatif et politique, Bruno Joly est souvent sollicité par la presse, les institutions et les associations.
« Certains me disent que pour moi c’est facile car je connais beaucoup de monde. Pourtant, il ne faut pas croire qu’un réseau se construit sans effort. C’est le résultat d’un engagement bénévole important qui effectivement rejailli sur la ferme », se défend-il.
La ferme du Pré Joly, Vienne (86)
Nombre d’associés : 5
ETP : 9
- 3 ETP dédiés à la production agricole
- 3 ETP dédiés à la transformation
- 3 ETP dédiés à la vente
Chiffre d’affaires : 785.000 euros
EBE : 42 %
Taux d’endettement : 20 %
Production végétale
SAU : 200 ha
SFP : 150 ha
- Maïs : 5 ha
- Méteil grain : 25 ha
- Grand épeautre : 3 ha
- Prairies : 117 ha
Culture de vente : 15 ha de blé
Mise à disposition de parcelle : 35 ha
Production animale
VL : 90 (plus 10 vaches nourrices)
- 50 montbéliardes
- 30 jersiaises
- 20 normandes
TP-TB : 36-46
Volumes produits :
- 155.000 l de lait bio vendus à Agrial
- 305.000 l transformés
Volumes transformés :
- 38.000 l pour la production de lait cru et lait pasteurisé
- 57.000 l pour la production de fromage lactique
- 130.000 l pour la production de tommes
- 5.900 kg de beurre
- 5.500 l de crème fraiche
Vente de viande en caissettes : 10 bœuf croisés et 10 veaux de lait
A lire aussi : Le Gaec des trois communes se diversifie pour faire vivre toute la famille