« La proximité de goût est un point critique pour le vin sans alcool »

Pour le cardiologue belge Marc Tomas, expert en œnotourisme et membre du collectif du vin No/Low, les vins sans alcool séduiront en premier lieu les jeunes, s’ils conservent les attendus gustatifs d’un vin et créent un univers marketing propre.

Pour Marc Tomas, membre du collectif vin no/low,  les vins sans alcool trouveront leur clientèle si la promesse du nom est tenue.

© Marc Tomas

>>> Avant de vous passionner pour le vin et d’en faire un de vos métiers, vous avez embrassé une carrière médicale. En tant que cardiologue, quelle est votre position sur la consommation d’alcool et de vin en particulier ?

Marc Tomas : Depuis 20 ans, je m’intéresse au vin et à ses apports pour la santé humaine, qu’ils soient positifs ou négatifs. Et les deux coexistent. Il n’y a qu’à regarder la littérature médicale sur le sujet.

L’effet dose est indéniable. Mais l’abstinence ne garantit pas l’absence de pathologies cardiaques.

Dans mon cabinet, mes propos relèvent donc du bon sens : la modération pour les consommateurs. Et que ceux qui ne boivent pas de vin continuent ! Les polyphénols et autres molécules d’intérêt se trouvent dans d’autres boissons et aliments.

>>> Les messages sanitaires français, à savoir maximum 10 verres par semaine, pas plus de 2 verres par jour et des jours dans la semaine sans consommation, vous semblent-ils mesurés ?

M. C. : Ce sont des repères qui guident vers une consommation réfléchie. Et, globalement, les gens font de plus en plus attention.

Les enquêtes de consommation réalisées régulièrement en France le montrent bien. La part de consommateurs occasionnels de vin ne cesse d’augmenter et celle des non-consommateurs se stabilisent à des niveaux significatifs.

En France, on boit moins.

La bière sans alcool progresse sur ce terreau. Elle satisfait les abstinents et les consommateurs de bières alcoolisées. Et au-delà de l’alcool, ces deux populations se retrouvent sur un point : le goût. Il y a une réelle proximité de goût entre une bière sans alcool et une bière avec alcool.

>>> Le monde de la bière doit-il inspirer celui du vin sur le créneau sans alcool ?

M. C. : L’aspect organoleptique est crucial. Les vins sans alcool trouveront leur clientèle si la promesse du nom est tenue. On s’attend à boire une boisson qui a le goût de vin.
Des vins effervescents sans alcool donnent désormais le change. Mais sur les vins tranquilles, et surtout sur le rouge, il y a beaucoup de progrès à faire.

>>> Quelle cible de consommateurs va s’intéresser aux vins sans alcool ?

M. C. : Le collectif du vin No/Low va prochainement mener l’enquête. On peut s’attendre à ce que les plus jeunes, les 18-45 ans, soient les plus réceptifs.

Dans tous les cas, sur un segment de niche sans histoire, pour réussir, les opérateurs et les metteurs en marchés devront faire preuve de créativité et d'audace. Je pense, par exemple, au format. Est-il pertinent de proposer du vin sans alcool en bouteille de 75 cl ?

La modération s’allège

Concernant la consommation d’alcool, les préconisations ayant court jusqu’en 2017 en France étaient fixées à 2 verres, soit 20 g d’alcool par jour pour les femmes ; 3 verres, soit 30 g par jour pour les hommes ; 4 verres maximum en une seule occasion, quel que soit le sexe ; 1 jour sans alcool.

Depuis 2017, les nouveaux repères de consommation d'alcool établis par Santé publique France sont :

  • maximum 10 verres par semaine,
  • maximum 2 verres par jour,
  • des jours dans la semaine sans consommation.

 


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Marc Tomas est aussi l'auteur du livre "Le tour du monde en 80 rouges" aux éditions Ercée. 

© Ercée